Publié le 12 Février 2020
Sur ReporTerre un reportage (super) sur un poète en langue d'oc qui écrit vraiment très bien, enfin des choses qui me touchent en poésie, une écriture avec laquelle je me sens connectée, aussi bien en langue d'oc que dans la traduction française.
Cela m'a remis à l'esprit qu'il y a une quinzaine ou une vingtaine d'année, ayant lu quelques poèmes en langue d'oc, je m'étais dit que j'apprendrais cette langue un jour, parce qu'il y a de grandes chances que mes ancêtres du côté de mon père l'aient parlée. D'ailleurs en faisant de petites recherches sur mon nom de famille qui se retrouve dans quelques pays méditerranéens et beaucoup dans le sud de la France, j'ai cru comprendre que c'était en nom en langue d'oc, probablement.
C'est comme si je comprenais déjà quand je lis les textes car cela ressemble un peu à l'espagnol, en tout cas sans doute serait-ce plus judicieux pour moi que d'apprendre le mapudungun ou le portugais que je maîtrise malgré tout, en tout cas pour ce qui est de l'écrit.
C'est pour la poésie que cette langue me plaît car la langue d'oc, c'est la langue des troubadours.
Voilà, c'est juste un projet, à caser dans tout ce que j'entreprends, évidemment. Je vous en reparlerais si je le fais.
Feuille envolée (chant)
Fa tant de temps e tant de mond
Qu’ombra trèvi pel camin blond,
Que cap paret, cap cant perdut
Non sap mai per ont soi vengut.
M’an remirat e m’an maldit,
M’an secutat e m’an faidit,
M’an oblidat e esfaçat :
Vau subre’l vent, fuèlh enaurat.
Casut soi ieu, posca de lutz,
Fanga de plors, flor de vertuts,
Parant la man qu’un pauc d’amor
S’i pause umil, sense clamor.
M’an enebit, m’an demesit,
M’an avalit, m’an detrusit.
M’an ignorat, m’an mespresat :
Vau subre’l vent, fuèlh enaurat.
De tant mirar lo fons del cèl,
Ne soi vengut miralh fisèl.
De tant beure a la font del mond,
Ai sentit en qué tot se fond.
Mas çò qu’ai vist, çò que t’ai dit,
Lo sol asuèlh qu’aja predit,
E mai se’m val d’anar per mat,
M’alanda al vent, fuèlh enaurat.
En français :
Il y a tant de temps, tant de monde,
Qu’ombre, j’erre au bord des chemins,
Que nul muret, nul chant perdu
Ne savent plus d’où je suis venu.
Ils m’ont admiré, puis maudit,
Puis persécuté, puis banni,
Puis oublié, puis effacé :
Je vais au vent, feuille envolée.
Je suis tombé, poussière de jour,
Fange de pleurs, fleur de vertus,
Tendant la main afin qu’un peu d’amour
S’y pose peut-être, sans bruit.
Ils m’ont interdit, puis défait,
Puis abattu, et puis détruit.
Puis ignoré ou méprisé :
Avec le vent je vais, feuille emportée.
De tant scruter le fond du ciel,
J’en suis devenu le fidèle miroir.
De tant boire à la source du monde,
J’ai senti en quoi tout se fond.
Mais ce que j’ai vu, que j’ai dit,
Le seul horizon que j’aie prédit,
Même s’il me vaut de passer pour fou,
M’ouvre au vent, bien en grand, feuille envolée.
Franc Bardóu
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