Le caillou veut être lumière. Il fait luire en l'obscurité des fils de phosphore et de lune. Que veut-il ? se dit la lumière, car dans ses limites d'opale elle se retrouve elle-même et repart. Federico Garcia Lorca
Elle contemple l’horizon qui épouse un ciel nuageux
Distrait par un arc-en-ciel accueillant
Aux couleurs doucement irisées.
Signe de paix ou de conflit entre pluie et soleil ?
Peu importe car son cœur est lourd.
En attente elle est,
A l’aube d’un voyage imposé dont une valise atteste.
Qui saura la distraire de ce chagrin récurrent qui la meurtrit ?
Une douce étoile aura-t-elle un geste de mansuétude ?
Car lancinante et douloureuse est son attente
Toutefois une once d’espoir s’annonce.
Sa pause s’alanguit tant elle se laisse distraire
Par le spectacle paisible d’une onde sans remous.
La mer lui parle tandis que le soleil réchauffe son cœur.
Son esprit rasséréné intègre un autre regard sur la vie,
Dans le vent qui entrebâille
Un buisson de feuilles en devenir
Dans le nid qui s’apprête à accueillir
La couvée du lendemain
Libre est la couche de brindilles
Enlacée d’un coton fraternel.
Dans l’eau de l’océan
Qui se teinte de méthylène
La vague plonge dans le message des murènes
Et glisse sur un sable blanc et soyeux :
La liberté a perdu ses yeux
La sirène étincelle et ses larmes en miroir
Sont des coupes de nacre et d’ivoire.
Le cinabre pilé dans le mortier d’un volcan
Ecrit son histoire qui brûle les doigts
Brûle le cœur de toute son ardeur.
Le feu détruit le germe de la vie
Pourtant la feuille souterraine un jour
Brise la croûte terrestre et sa bogue de calcaire
Et dit d’un clignement d’œil : C’est moi que voici !
Si la terre matérialise tous nos propos
Mimant et érigeant le pouvoir de nos exigences
Si la terre absorbe avec bonté
Le sang, les pollutions et les gens malmenés
Elle est libre
Comme l’air,
Le feu
Et l’eau.
D’un tremblement sa fièvre s’exprime
D’une secousse elle vire ce qui l’éclabousse
D’une pichenette elle nous réduit en miettes
D’une escarboucle elle érige la cordillère
Au beau milieu de la grande avenue de nos vanités.
***---***
Vivre libre, oui !
Sur une terre libre et dégagée
Vivre libre, oui !
Sur une planète-paix
Sur un océan-aimant
Sur un volcan adouci par l’amour
Avec en ciel de vie
Un air révolutionnaire et libertaire
Pour briser toutes les chaînes
Aux pieds, aux mains, aux cous
Aux troncs d’arbres, aux rus et aux monts
Aux cœurs, aux chevilles, aux limons
Aux reins, aux cervelles, aux bayous.
Carole Radureau (15/05/2015)
ANTIDOTE DE LA SERVITUDE
C’est une île éloignée, une poussière de rêve
Qui sort de l’hiver
Sous les yeux engourdis d’une brume en pyjama
Une bouche de corolle qui fait taire les hautbois
Une crinière de nuage, un aigle cavalier
Qui entre les barreaux
Prend la main de l’indien, au sortir de la nuit
Prend la main de l’espoir des âmes bâillonnées
C’est un cœur dévoré d’absence aux yeux de jaspe
Un galop d’hirondelle assourdissant le ciel
Germant les herbes folles
Des pleurs de coton s’élevant des guitares
Qui vomissent sans fin de ductiles maillons
Quand les croyances nous drossent vers la stabulation
Résonne les mutismes des enfants de demain
Agnelage lénitif, fantomatique stratus
Les bourgeons agonisent sous d’impeccables bottes
Elle accroche dans le ciel, un fanal salvateur
Unit étoile et vagabond
Un sourire de rocher ivre de galaxie
Un pinson qui serine d’impavides billevesées
Un peintre avec mots a chanté son portrait
Graffiti intempestif des arbres, des cahiers
Qui vient seller les grands nuages rebelles
Pour chevaucher plus vite que le vent des sept mers
Ombre délicate après semailles,
Pensées soyeuses qui flottent
Vers un devenir incertain.
Effeuillage sans douleur
Au gré d’un vent malin.
Cœur où gît la vie :
Un arbre dépouillé rend compte de ses battements
Qui s’ébrouent fragiles
Tels des papillons ardents
Qu’un souffle ne peut retenir.
Délicatesse et beauté de l’instant
Lorsque le rêve soupire
Et que les regrets fugaces s’envolent,
Mêlant et emmêlant peines et joies
Pour se fondre dans un doux souvenir
De ce qui fut et qui reste impérissable
Car notre âme y pourvoit.
Dans le silence d’un cimetière de volcans
Souffle une fièvre poivrée
Regorgeant de convoitise
Voguent déjà les cales Andalouses
L’orangé des soleils couchants pâlit
Dans l’innocence d’un solstice
Déjà les cupides solerets
Ecorchent la quiétude des rivages
Déjà ton chant ouvrait les yeux
Les hêtres pleurent la disparition des vents lucides
Dans les bouches s’estompe la vigueur du sel
Cette laisse trop courte au cou des Alpagas
Fane l’espoir des fleurs, la confiance des neiges
Les inexorables nuages aux syntaxes de plomb
Meurtrissent les mains tendues
Faisant couler l’acier aux joues des fleurs sincères
Déjà ton sanglot étanchait les consciences
Avril fleurissait chaque grain de sable
Dans les gènes du temps, le secret des déserts
L’océan n’habitait pas encore les yeux du Guanaco
Le tranchant de l’or n’avait pas rompu
L’amour qui nous sert d’amarre
Déjà dans la pierre tu ciselais l’avenir
Alors quand la cohérence du pain
Emiettera l’éthique des servitudes
Quand psaumes et sourates en auront fini de la nuit
Entre le rauque fracas des absences et la capture des rêves
Comme le libre nuage, dérober au vent ses chevaux
Boire le lait de la terre aux larmes de chamelle
Car le sel profond engendre les océans fertiles
Il est notre héritage
Prends ce sel Pablo
Portes le à la bouche des siècles
Ravive la lueur dans les yeux de l’horizon
Offre ce pain à l’avenir des sentiers
Ranime la présence du vent salutaire
Fais glisser une brume de cœur sur la joue de nos souffrances
Comme tu as déversé tes larmes sur le désert d’Atacama.
Hobo Lullaby
LA PIERRE DE PABLO
La petite fille a grandi puisant dans la sève d’un coquelicot
Le poids de son fardeau.
Dans le verre d’un poète un jour elle trempa ses lèvres hésitantes
Elles y restèrent collées à jamais.
Il fallu un jour prendre de la hauteur.
Les cimes andines ouvraient leur cœur
Je m’y plongeais ravie portée par le courant des ondes du condor.
Si la feuille un jour dessina son trajet sur le parchemin de sa cambrure
J’ai suivi une à une ses troublantes nervures.
Dans les odes la simplicité des jours sans orages
Nous lisons à travers les corsages pour y puiser de ténébreux frissons.
Sur le chemin de la rose je trouvai la pierre de Pablo.
Infini était son propos, lancinantes les questions clamées haut dont les réponses
N’étaient pourtant pas inconnues.
Sur le chemin des pierres, le grain signe un parcours que l’on suit sans mot dire
La vérité est dans sa fibre. Ensuite il faut choisir.
J’ai écouté de toutes mes oreilles si on allumait les étoiles dans le ciel
Un chant de rossignol répondit à l’écho.
Chaque note avait un but, chaque son portait en lui une évidence.
Il était le mot-clé puisé dans la poésie de Pablo.
J’ai partagé le cours de ma vie en suivant le cours de sa poésie
Chaque mot construisit l’édifice porté par le surréalisme de ceux qui vivent à travers
Un songe.
Chaque leçon apprise forgea dans ma matière
Une géographie à jamais retenue. Une majestueuse planète terre
Sur laquelle règnent douceur, humanisme et tendresse
Sur laquelle règnent attention, paix et ivresse
Sur laquelle règne en son grand cœur de troubadour le simple mot de l’amour.
Car l’amour c’est une canne qui porte un corps en souffrance
Car l’amour c’est un sourire dans un champ de fleurs indifférentes
Car l’amour c’est une fougère qui agite tendrement les spores de sa descendance
En fêtant sans outrance la légèreté de l’être
Quand la fusion des âmes entre à jamais dans l’écriture de l’histoire.
……. ……… …….. …….. ………
Un jour, je me coucherai sur un lit de terre-mère
Je fermerai à jamais mes paupières de fer
Que mon corps préparé fusionne avec ce qui un jour le porta
Que mon corps fatigué s’éteigne avec lenteur
Dans cette matière première
Sur une vie bien remplie mais toujours à la recherche
De son tendre mot-frère.