aragonite

Publié le 28 Mars 2023

Pas le coeur à écrire en ces moments de terreur que vit notre pays, en cette journée anniversaire de l'un de mes poètes compagnons de route, je préfère lui rendre hommage, lui qui écrivait à l'encre de son coeur et dont ses tripes n'étaient pas non plus bien loin de l'affaire. Mort dans les geôles fascistes......te recuerdo, Miguel.

D'où que tu es, donne-nous la force nécessaire à ce qui vient.

 

.....Miguel Hernandez.......

 

Assis sur les morts

Qui en deux mois se sont tus,

J’embrasse des chaussures vides

Et j’empoigne rageusement

La main du cœur

Et l’âme qui le maintient.

 

Que ma voix monte sur les monts

Et descende à la terre et tonne

C’est cela que demande ma gorge

Dès maintenant et depuis toujours.

 

Approche-toi de ma clameur

Peuple du même lait que moi,

Arbre qui avec tes racines

Emprisonné me tiens,

Parce que je suis ici pour t’aimer

Et je suis là pour te défendre

Avec le sang et avec la bouche

Comme deux fusils fidèles.

 

Si je sortis de la terre

Si je suis né d’un ventre

Malheureux et avec la pauvreté,

Ce ne fut que pour devenir

Rossignol des malheureux

Echo du mauvais sort

Et pour chanter et parler sans cesse

A qui se doit de m’écouter

De tout ce qui se réfère

Aux peines, aux pauvres et à la terre.

 

Hier s’est réveillé le peuple

Nu et sans rien à se mettre,

Affamé et sans rien à manger

Et en ce jour il se réveille

Justement orageux

Et sanglants avec justice.

Dans sa main les fusils

Veulent devenir des lions

Pour en finir avec les fauves

Qui l’ont été tant de fois.

 

Même si les armes te manquent,

Peuple de cent mille pouvoirs,

Que tes os ne défaillent pas,

Châtie celui qui te blesse à mort

Tant qu’il te reste des poings,

Des ongles, de la salive, et qu’il te reste

Du cœur, des entrailles, des tripes,

Des organes virils et des dents.

Brave comme le vent brave,

Léger comme l’air léger,

Assassine celui qui assassine,

Abhorre celui qui abhorre

La paix de ton cœur

Et le ventre de tes femmes.

Qu’on ne te blesse pas de dos,

Vis face à face et meurs

Avec la poitrine face aux balles,

Large comme les murs.

 

Je chante avec la voix en deuil,

Mon peuple à moi, pour tes héros :

Tes angoisses comme les miennes,

Tes infortunes qui possèdent

Les pleurs du même métal,

Les peines de la même tempérance,

Et du même bois

Ta pensée et mon front,

Ton cœur et mon sang,

Ta douleur et mes lauriers.

Cette vie me semble

L’antichambre du néant.

 

Je suis ici pour vivre

Tant que l’âme résonne en moi,

Et je suis ici pour mourir,

Quand l’heure me viendra,

Dans les sources du peuple

Dès maintenant et depuis toujours.

La vie est faite de plusieurs gorgées

Et la mort n’en a qu’une seule.

 

 

Paru dans Mon sang est un chemin, traduction de Sara Solivella et Philippe Leignel

Pablo Neruda consacre un chapitre de ses Mémoires J'avoue que j'ai vécu à Miguel Hernandez et à la rencontre lumineuse qu'il a eu avec lui:

" A peine arrivé à Madrid, et devenu comme par enchantement consul du Chili dans la capitale espagnole, je connus tous les amis de Garcia Lorca et de Rafael Alberti. Ils étaient nombreux. Quelques jours plus tard, j'étais un poète de plus parmi les poètes espagnols. Ce qui ne nous empêchait pas, Espagnols et Américain, d'être différents. Cette différence, naturelle, entre nous, les uns l'affichent avec orgueil, et les autres, par erreur. 

Les Espagnols de ma génération étaient plus fraternels, plus solidaires et plus gais que mes compagnons d'Amérique latine. Pourtant, je pus constater en même temps que nous étions plus universels, plus au courant des langages et des cultures. Peu d'Espagnols parlaient une autre langue que la leur. Lorsque Desnos et Crevel vinrent à Madrid, je dus leur servir d'interprète pour qu'ils se comprennent avec les écrivains espagnols.

L'un des amis de Federico (Garcia Lorca) et de Rafael (Alberti) était le jeune poète Miguel Hernandez. Quand nous fîmes connaissance, il arrivait en espadrilles et pantalon de velours côtelé de paysan de ses terres d'Orihuela, où il avait gardé des chèvres. Je publiai ses vers dans ma revue Cheval vert: le scintillement et le brio de son abondante poésie m'enthousiasmaient. 

Miguel était si campagnard qu'il se déplaçait entouré d'un halo de terre. Il avait un visage de motte de glaise ou de pomme de terre qu'on arrache d'entre les racines et qui conserve une fraîcheur de sous-sol. Il vivait et écrivait chez moi. Ma poésie américaine, avec ses horizons nouveaux, ses plaines différentes, l'impressionna et le transforma.

Il me racontait des fables terrestres d'animaux et d'oiseaux. Cet écrivain sorti de la nature était comme une pierre intacte, avec une virginité de forêt, une force et une vitalité irrésistibles. Il m'expliquait combien il était impressionnant de coller son oreille contre le ventre des chèvres endormies. On entendait ainsi le bruit du lait qui arrivait aux mamelles, la rumeur secrète que personne d'autre que lui, le poète-chevrier, n'avait pu surprendre.

D'autres fois il me parlait du chant du rossignol. Le Levant espagnol, son pays d'origine, était rempli d'orangers en fleur et de rossignols. Comme au Chili ce chanteur sublime n'existe pas, ce fou de Miguel voulait recréer pour moi dans sa vie même l'harmonie de son cri et son pouvoir. Il grimpait à un arbre de la rue, et du plus haut des branches, sifflait ou gazouillait comme ses chers oiseaux natals. 

(...) Le souvenir de Miguel Hernandez ne peut se détacher des racines de mon cœur. Le chant des rossignols d'Orihuela, leurs tours sonores érigées dans la nuit parmi les fleurs d'oranger, étaient pour lui une présence obsédante et constituaient une part du matériel de son sang, de sa poésie terrestre et rustique, dans laquelle se fondaient tous les excès de la couleur, du parfum et de la voix du Levant espagnol, avec l'abondance et la bonne odeur d'une jeunesse puissante et virile.

Son visage était le visage de l'Espagne. Taillé par la lumière, ridé comme un champ labouré, avec ce petit côté de franche rudesse du pain et de la terre. Ses yeux brûlants, flambant sur cette surface grillée et durcie par le vent, étaient deux éclairs de force et de tendresse.

Et je vis sortir de ses paroles les éléments même de la poésie, mais modifiés par une nouvelle grandeur, par un éclat sauvage, par le miracle du vieux sang transformé en descendance. J'affirme que dans ma vie de poète, et de poète errant, il ne m'a jamais été donné d'observer un phénomène semblable de vocation et d'électrique savoir verbal".

(Pendant la guerre civile après le coup d’État de Franco ) "Federico avait été assassiné à Grenade. Miguel Hernandez, de chevrier, s'était transformé en verbe militant. Dans son uniforme de soldat, il récitait ses vers en première ligne.

(...) Miguel Hernandez chercha à se réfugier à l'ambassade du Chili qui durant la guerre avait accueilli une quantité énorme de franquistes: quatre mille personnes. L'ambassadeur, Carlos Morla Lynch, qui se prétendait pourtant son ami, refusa l'asile au grand poète. Au bout de quelques jours, Miguel était arrêté et emprisonné. Il mourut de tuberculose, dans son cachot, sept ans plus tard. Le rossignol n'avait pas supporté sa captivité". source

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Rédigé par caro et hobo

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Publié le 3 Décembre 2022

 

Peut-être demain les poètes demanderont ils

Pourquoi n’avez-vous pas célébré le charme des filles ;

Peut-être demain les poètes demanderont-ils

Pourquoi vos poèmes 

Etaient-ils de longues avenues par où surgissait la colère en

Flammes ?

 

Je réponds que de tous côtés on entendait les pleurs,

De tous côtés nous encerclait un mur de vagues noires.

La poésie allait-elle être

Une colonne solitaire de rosée ?

 

Quand elle devait être un éclair incessant.

 

Je vous le dis :

Tant que quelqu’un ici-bas souffrira,

La rose ne pourra pas être belle ;

Tant que quelqu’un regardera le pain avec envie,

Le blé ne pourra pas trouver le sommeil ;

Tant que les mendiants pleureront de froid dans la nuit,

Mon cœur ne pourra pas sourire.

 

Tuez la tristesse, poètes.

Tuons la tristesse en la rouant de coups de bâton.

Il existe des choses plus importantes

Que de pleurer l’amour des soirées perdues ;

La rumeur d’un peuple en éveil

Est plus belle que la rosée.

Le métal flamboyant de sa colère

Est plus beau que la lune.

 

Un homme vraiment libre

Est plus beau que le diamant.

 

Parce que l’homme s’est réveillé

Et que le feu a fui sa prison de cendre

Pour incendier le monde où sévit la tristesse.

 

Manuel Scorza (Les imprécations, 1955, traduction de Claude Couffon)

 

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Rédigé par caro et hobo

Publié dans #Aragonite, #Echo de poète

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Publié le 4 Octobre 2022

(...)
La poésie est le pédalier d'un rutilant vélo. En elle chacun grandit. Les chemins sont blancs. Les fleurs parlent. De minuscules fillettes surgissent à tout moment de leurs pétales. Cette excursion n'a pas de fin (.....)

Andréas Embirikos (La tresse d'Altamira) traduction Jacques Lacarrière

Les chemins sont blancs

Je ne peux décemment, sur un texte si beau, déflorer son aura et me laisser, aller, minuscule fillette sur les chemins blancs, même si, il y a des fleurs partout.

Je vous laisse donc avec cette merveilleuse définition de la poésie.

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Rédigé par caro et hobo

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Publié le 20 Septembre 2022

J’ai le privilège des yeux. Poème en l’honneur de Pablo Neruda

 

Je n’ai jamais vu le vol du condor

Au-dessus de la cordillère enneigée

Au-dessus de ta petite patrie à la hanche mince

Ni le copihué fleurir dans la forêt araucane

Ni l’araucaria araucan qui fait tomber ses fruits

Pour soutenir la lutte des Mapuche

 

Sinon, à travers tes yeux

Sinon, à travers tes mots

Sinon, à travers ta poésie

 

Tes yeux tes mots ta poésie

Jamais

Ne

Me

Manquent

Car

Toujours

Ils m’

Accompagnent :

 

Je vis dans la maison des odes.

 

J’en prends de la graine

Une graine en français, traduite

Puis une graine castillane, officielle

Je navigue dans deux langues

Comme une embarcation

Sur le rio Mapocho

 

J’ai la persévérance des elfes

Quand la poésie se tresse en des lianes

Pavoisées

Que la brume se lève sur des mots encore non dits

Que les métaphores sonnent

Faux

 

J’ai l’insistance des rêves

Comme un marteau trop tôt

Asséné sur l’enclume de la vérité

Je ne veux pas reculer l’étain

S’il n’a pas été encore

Affranchi

 

Ta voix m’élève au-dessus de l’océan

Et ton cœur me guide

Pas à pas

Tu es un compagnon de route

Je ne t’ai pas choisi

C’est toi

Qui m’a

Un jour

Choisie

M’envoyant un

Croche-pied

Je ne suis pas tombée sinon

Dans la soupe de la muse

Peut-être la tienne

Me l’as-tu prêtée car

Je ne sais d’où elle vient ?

 

Elle s’est habituée à moi

Attends que l’heure du poème sonne

Non pas sur la plage de l’Ile Noire

Comme elle aimerait,

Se laissant guider par les formes

Dessinées

Dans

Le sable

Et par le chuintement chaud de l’écume

Déposée dans des bras d’algues fières

La muse me fait confiance

Elle sait

Que même coite

La poésie en moi continue de naviguer

Frêle esquif qui se balance comme balayé

Par les tempêtes du moment

Cherchant son cap

Cherchant comment ramer

Car la voile trop fine

Un jour

S’est déchirée

Guidée par le tableau toujours émouvant

Des étoiles

Par les vols puissants des oiseaux marins

Maîtres des cieux et des océans

Je navigue à vue

Ne cherchant même pas une île

Mais un démon

Ou bien

Une figure de proue peut-être

Abandonnée sur un tronc d’arbre si vieux,

Ballotté

Depuis tant d’années

Par les flots

Avec sa figure qui s’accroche comme une désespérée

Avec son sourire

Avec ses dents toujours blanches

Et

Une chevelure

D’écume jamais délavée

 

Je te parle et tu me réponds

Par poésie interposée

Il n’est pas terminé

Le chemin poétique qui nous unit

Je n’ai pas encore puisé au plus profond

De ton verger tellurique

Ni dans la grande classe prolétaire

Qui ne fait pas rimer le vent et l’air

Mais l’homme et l’oiseau

L’arbre et le blé

 

Je ne suis que petite poésie

Qui tient toujours ta grande main

Généreuse et prospère

 

Je ne suis que petite apprentie

D’automne

Ou bien

D’hiver

Qui chevauche auprès de l’automne et de toi, cavalier

Dans les sous-bois où gémissent

Les derniers alerces

Où les pics tambourinent en morse des SOS

 

J’ai le privilège des yeux

La chaleur chilienne des mots

La plume féconde de la poésie

Ces choses que tu m’as léguées

Malgré toi ?

 

Carole Radureau (20/09/2022)

 

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Rédigé par caro et hobo

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Publié le 16 Janvier 2022

 

Parlez-moi dans la langue que je veux entendre

Jusqu’au plus profond de son vocable

Sa plus réservée expression

Son ton le plus exigu

Qu’elle chante en moi la chanson de l’eau

Déboulant les pentes de l’Aconcagua !

 

Parlez-moi dans la langue que je veux comprendre

Arrachées à l’extrémité suprême de ses racines

Puisées dans les profondeurs de son âme

Tirées du puits des plus vieilles connaissances

Les paroles qui l’a font murmurer, chanter, crier.

 

Parlez-moi dans la langue que je veux surprendre

Au saut du lit

Dans le bol du cratère

Sur les contreforts de la cordillère

Dans la fraîche Patagonie

Sur les plages où débarquèrent un jour les Caribes

Bousculée par le vent dans l’isthme de Tehuantepec

Chahutée par le souffle chaud du Gran Chaco

Titillée par la vérité profonde de l’Amazonie

A la conquête des trésors du Machu Picchu

Sur Chiloé marin découvrant le berceau de la papa

Galopant avec les Mapuche dans la belle Araucanie

Puis dans les lagunes colorées de Bolivie

Admirant le soleil qui fait la cour au rose des flamants.

 

Parlez-moi de la langue que je veux entendre

Mais surtout écrivez-la moi :

Car, là, vous pourrez me surprendre

Dans toute la profondeur de mon être

La surdité est un frein à la conquête des belles paroles qui plaisent

La surdité est juste compensée par la lecture et l’écriture :

C’est une riche compensation.

 

Je voudrais

Tel un jongleur

Maîtriser le lancer de mots

En connaître la géographie, la souplesse, la trajectoire

Dans le creux de ma main,

Les recevoir

Comme de petits colibris

Sacrés et précieux : fils de la vie !

 

Je voudrais

Les ranger dans cet ordre les mots, et puis dans cet autre

Les mêler, les déranger, les distendre, les inventer

En faire des colliers de perles

Des outils, des armes, des frondes

Pour qu’ils servent, oh ! oui, servent très bien

Les luttes des peuples.

 

Elle est belle la parole militante !

Elle est riche la parole que l’on porte à bras le cœur

Dans sa tenue d’exotisme oubliant les conquêtes

Qui lui ont prêté une parole maudite

Pourtant, elle se propagea comme une fleur conquise

Elle envahit tout mais on l’avait bien aidée en cela

D’un continent elle en fit sa calebasse de maté

Raflant tout comme un raz de marée

Pourtant elles vivent, présentes au milieu d’elle

Les belles langues indigènes, renaissant, revivifiées

Par la dure réalité de la perdition prochaine, promise par certains :

Rien ne se perd sauf la volonté

Rien ne peut s’altérer quand on a pris conscience, heureusement

Que tout sur cette planète peut s’additionner

Au milieu du respect et de l’amour de la diversité.

 

Carole Radureau (16/01/2022)

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Rédigé par caro et hobo

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Publié le 12 Juin 2021

......écho de poète.....

Le caillou c’est le caillou, et l’étoile c’est l’étoile.
mais quand je prends le caillou dans ma main et le
serre et le jette et qu’à nouveau je le ramasse…..Quand je le
passe et repasse entre mes doigts…..l’étoile c’est l’étoile, mais
le caillou est à moi….
Et je l’aime !

Dulce María Loynaz, Poèmes sans nom XXI, traduction Claude Couffon

Le caillou est à moi

Mais sa voix

C’est la voix cassée de l’étoile

qui a trop crié son nom au vent

Mais son sang de caillou

C’est une pierre précieuse

qui peine à ne pas être arrachée

Mais sa chair est dure quand elle

voudrait

être tendre

Et son cœur est intermittent

alors qu’il le voudrait joyeux

 

Le caillou est le sosie de l’étoile

Comment ne l’avions-nous pas deviné

C’est une pulsation de rêves

Un départ annoncé

 

Je l’aime le caillou

Non pas parce qu’il est à moi

Mais parce qu’il Est

Je l’aime l’étoile

Non pas parce qu’elle n’est pas à moi

Mais parce qu’elle Est

Que son sang bat dans nos veines

Que sans elle il n’y aurait pas de caillou

Ni de mains pour le tenir.

 

Carole Radureau (12/06/2021)

 

Le caillou c’est le caillou – Dulce María Loynaz

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Publié le 6 Juin 2021

A la flamme du maintenant. Regino Pedroso

.......écho de poète......

A la flamme du maintenant
Je concocte impatient la chanson de demain :
Je veux aspirer fort cette nouvelle époque
Dans ma grosse pipe de jade.
Curieuse, l’inquiétude a chassé le sommeil de mes yeux obliques.
Et pour sonder plus à fond l’horizon,
Je saute sur la vieille muraille du passé….
J’étais jusqu’à ces jours cérémonieux et pacifique !

Regino Pedroso (Pensées du nouvel étudiant) traduction de Claude Couffon

A la flamme du maintenant

J’évite la rosée car ses gouttelettes trop tendres

Parfois m’endorment

 

Je siffle une chanson fausse sur une aire d’autrefois

Qui avait vaincu à la force des tempes

Les nuisances ténébreuses

 

Il n’est pas trop tard pour y croire encore

Même si quelque chose a changé et cela n’a rien à voir avec l’âge

Il y a des connaissances qui semblent intéresser chaque composante

De ce monde qui part à la dérive

Mais le sang qui bat dans les tempes

Est un verre qui ne veut pas tomber ivre

 

La réalité est un sang neuf jamais éprouvé

Lorsqu’il coule de toute sa virginité dans la rue

C’est un sang cru

Il faut reconnaître son sacrifice

Se dire que celui-ci aurait pu être évité

 

Et la paix et l’amour et l’égalité et la justice

Ne se gagnent pas dans une cour d’opérette

Dommage !!

 

Il serait bien sage et à-propos

Que les gardiens du temple se laissent amadouer

Par Julio ou Chanteclerc

Avec une larme aux yeux

 

Ils sont des gardiens que rien n’arrête

Surtout pas ce qui sent très fort

Car hélas sans compassion je le dis haut et fort

L’odeur nauséabonde est leur vertu

 

Et chaque jour je parle des roses

Je parle des fleurs

J’admire les tapis et compose une mélodie

Propre au merle sans souci et pourtant plein de soucis

 

Ne me dites pas que je n’ai pas parlé des fleurs

La chanson à moi, très connue appréciée et perçue

Comme il se doit comme une évocation

 

Je singe la rose dans sa petite tenue

Et mon esprit s’évade près du peuple péruvien

Qui risque gros car il risque gros

Surtout les peuples indigènes, le peuple d’en-bas

Et notre chère Amazonie

 

Je récite la rose dans sa grande garde-robe

Et mon âme pleure avec les victimes tombées sur les barricades

De l’honneur et de la dignité en Colombie

 

Et je souris à l’idée que les peuples chiliens

Pourraient débouler dans un jeu de quilles

Avec tout le poids de leurs traditions

Tout le poids de leur sagesse

Et leurs belles pensées

 

Quand la rose fleurit

L’étendard des luttes brille à travers elle

Et dans son cœur des milliers de lueurs

S’envolent telles des pensées aux ailes d’amour.

 

Carole Radureau (06/06/2021)

 

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Rédigé par caro et hobo

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Publié le 19 Mai 2021

Cordillère Royale Bolivie By LBM1948 - Own work, CC BY-SA 4.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=65883042

Cordillère Royale Bolivie By LBM1948 - Own work, CC BY-SA 4.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=65883042

……écho de poète……

(….) Je naquis de l’enfantement de l’or
De la tourmente verte.
Il ne me manque ni le fouet de la foudre
Ni les rênes du vent,
Pour être le cavalier de l’aurore
Avec mon poncho de nuages
Et la guitare de cristal du fleuve
Sur les larges épaules de l’infini (….)

Raúl Otero Reiche, Chant à l’homme de la forêt (Canto al hombre de la selva) traduction Nicole Priollaud

J’ai parcouru l’âme entière de la cordillère

Suivant le sillon du condor

Et semé mes graines légères

A la volée du temps.

 

D’un nuage je dicte au vent ma leçon

C’est l’adéquation des verbes

La fusée du printemps rime en principe

La décision ultime.

 

Avec le sang de la selva j’écrirai le grand livre du monde

Puisant de l’encre dans celle venimeuse d’une minuscule grenouille

C’est poison et toxique la magie tellurique de la terre

Il convient de laisser

Rangées les choses

De savoir ne pas les exploiter

 

Je réciterai le serment sur le cerro de nuage

Détricotant les habitudes et brisant les compulsions

Rien qui ne soit simple vie à sa place dans ce monde

Immatériel

Rien qui ne soit beauté quand on a, au lever du jour

Le sourire de beauté en vue.

 

Carole Radureau (19/05/2021)

 

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Rédigé par caro et hobo

Publié dans #Pas un jour sans poème, #Aragonite, #Echo de poète

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Publié le 17 Mai 2021

…….écho de poète……

(…..) Alberti,
que tes eaux soient pures
dans ton ciel, que ta
pluie tombe doucement
aujourd'hui sur ma
poitrine,
que ton ciel pleuve fertile
en Espagne,
que ta voix soit entendue en Amérique,
et sur terre donne ses
fruits, des fleurs dans les océans,
sème des arbres chez les
hommes. Remplisse de fleurs
ce monde. (….)

Javier Heraud Poème à Rafael Alberti

http://cocomagnanville.over-blog.com/2021/05/poeme-a-rafael-alberti-de-javier-heraud.html

Du guérillero au marinero

La parole portée

Soufflée au gré du vent

Tamisée

Restée pure

Comme un géranium érigé sur le monde.

Dans la selva

Pieds dans la boue

Quand l’adversité est derrière chaque tronc

Si la lutte est au diapason

Jamais le poète n’oublie qu’il est poète

Et sur la mer

Dans le cri de l’exil

Récoltant sur la plage les larmes

De l’Espagne en sang

Le poète est un songe de nacre

Pour écrire sur les bannières le mot

LIBERTE

 

Il n’y a pas de règle

Il y a la beauté née de certaines valeurs

Dans l’écume et le chant des sirènes

Dans la volonté sacrée de changer l’ordre des choses

Peu importe le chemin que tu prends, poète

La rose de ton cœur connaît ce chemin

Parfois tu meurs la rose de la poésie en main

Des aiguillons plein les paumes

Parfois ton exil est un aiguillon profondément

Planté dans une aile de ton cœur

Il te faut attendre

Le moment

Ce moment qui viendra un jour, on ne sait quand

Aurais-je le temps te dis-tu

Mais le temps est têtu

Et la camaraderie a porté bien haut

La parole pensée

Tes bouquets d’amitié et de solidarité

Jusqu’au-delà des océans

 

Et le poète guérillero a chu

Brisé dans le vol souple de son âge tendre

Les balles dum-dum l’ont envoyé

Côtoyer les muses des anges

Avec la force de cette furie

Destructrice de la haine et de la peur.

 

Y-a-t’il des fleurs dans ton poemario de l’au-delà

Pour nous les envoyer au semblant des vagues

Sur le lit bienheureux de Rafael

Et des autres poètes de la vérité chantée ?

 

Je voudrais que l’onde tisse sa toile d’énergie

Dans laquelle

Se prendraient

Au vent dans ses petites serres collantes

Vos mots, poètes de mes faveurs.

 

On puise en vous ce que vous avez voulu donner

Soyez sûrs que chaque mot vaut son pesant

Qu’elle est belle la poésie que nous perpétuons

Par vous, de vous, au-delà de vous

De chaque fleur de vos rimes

Naissent des révolutions.

 

Carole Radureau (17/05/2021)

 

Du guérillero au marinero. Javier Heraud

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Rédigé par caro et hobo

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Publié le 9 Avril 2021

Aconcagua Par François Bianco — Aconcagua reflexion, CC BY-SA 2.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=49260690

Aconcagua Par François Bianco — Aconcagua reflexion, CC BY-SA 2.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=49260690

Echo de poète

Je me souviens des gestes
et c’était pour me donner de l’eau.
Dans la vallée du Rio Blanco,
où prend naissance l’Aconcagua, je vins boire,
je bondis boire dans le fouet d’une cascade,
qui tombait chevelue et dure et se rompait rigide et blanche.
Je collai ma bouche aux remous, et cette eau sainte me brûlait,
trois jours durant ma bouche saigna de cette gorgée d’Aconcagua (….)
"Boire", de Gabriela Mistral, extrait du recueil D'amour et de désolation, traduit de l’espagnol par Claude Couffon (ELA/La Différence 1988)

Et c’est ainsi que saigne le corps

Qui reçoit la douce source de la vie

Quand elle jaillit de ce long parcours

Elle a reçu en elle tant de promesses minérales

Tant de feu et d’ardeur

La tête nous tourne de toutes ces pierres qui se sont

Moulues jusqu’à plus faim

Pour se fondre dans l’eau qui désaltère

Mais la matière jamais ne se perd

Tout est recyclé

Et quand la brûlure de la terre en toi

Se fait plus forte c’est que

De sa manière forte elle crie

De tous ses yeux d’eau sacrée :

Elle a compris le message de la rareté.

Carole Radureau (09/04/2021)

 

……poésie d’avril 2021….

…..pas un jour sans poème……

C'est avec ce poème-passerelle de Gabriela que je termine cette (longue) première semaine d'avril consacrée à l'Echo des poètes (j'y reviendrais certainement dans quelques mois). Ce poème nous ouvre les bras de mon prochain thème, un thème qui me tient à coeur car il me semble de grande urgence et de grande importance puisque vital, l'étau se resserre comme un goulet sur son filet : l'eau.

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Rédigé par caro et hobo

Publié dans #Echo de poète, #à la petite semaine, #Aragonite, #Pas un jour sans poème

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