Publié le 3 Mars 2022
Par Dr. Raju Kasambe — Own work, CC BY-SA 4.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=43300845
Madame L en avait deux
Deux L amplement déployées
Couvrant de leur ombre
Le ciel
S’étendant avec ardeur
Alors que l’on n’en profitait
Cela, sans se soucier
Les ailes peu à peu furent rognées
Chaque jour davantage
Elles perdaient
De leur substance
De leur saveur
De leurs connaissances.
Certains s’étaient employés
A leur façon et dans les rues
Tant de semaines, tant de mois
A leur façon bien à eux, de crier :
On nous vole Madame L !
On nous la coupe !
On nous la scie !
Nous ne voulons pas l’abandonner !
C’est que Madame L avait un fan club
Pour certains, elle avait une certaine valeur !
On parlait de ceux-ci avec beaucoup de dégoût
Avec beaucoup de jugement critique
On les amalgamait, on les rangeait dans des classes
Pas toujours bien desservies
On leur prêtait bien des mots
Dont un gros qui a fait les beaux jours du coronavirus.
Avaient-ils tort ?
Avaient-ils raison ?
Il n’y a pas de fumée sans feu
Chaque jour le corsage de Madame L
Prenait l’air, l’air froid
Et brun
Y entrait
Par de nombreux interstices.
On nous coupait l’herbe sous le pied
Avec des ciseaux cranteurs
On découpait nos propos parfois même
Ils ne pouvaient pas naître
Si bien que nous étions réduits
A parler comme autrefois, aux grandes époques de la débrouille :
Utilisant des métaphores
Utilisant des textes à trous
Utilisant des reprises poétiques
Comme ces petits messages tombant du ciel
Disant Madame L, j’écris ton nom
Sur les cahiers d’écolier
Sur les murs
Sur la plage
Dans toutes les échancrures des corsages
Je veux dire que l’on t’écorche ;
Vous pouvez me traiter de noms d’oiseaux (ils sont mes amis)
Vous pouvez traîner ma poésie
Au fond d’un cachot, au fond de l’ignorance
Je ne suis pas poète de renom
C’est chaque jour que s’écrit mon vers
Avec mes mots, avec mon cœur
Avec ma petite volonté :
Je crie quand l’oiseau est mazouté, j’écris
Je crie quand on nous emmure, j’écris
Je n’ai pas une grande expérience
Pourtant je sais ce que Madame L
A perdu, sans complaisance
Je sais que l’histoire, sans cesse se répète
Je sais aussi où l’histoire nous conduit
J’aimerais à mon tour faire pleuvoir
Des messages sur vos têtes
De petits mots voladores
Forts, très forts de Madame L
Forts, très forts d’ondes pures
Forts, très forts de solidarité
Réalisez !
Réalisons !
Ce qui nous guette ce n’est pas la serviette sur le sable blond
Ce n’est pas le bol d’air au pays des marmottes
Chaque jour battons la brèche
Faisons de notre mieux
Désinformons-nous
Réinformons-nous
Rhabillons comme nous le pouvons Madame L
De ses plus beaux atours
De rectrices veloutées
De caudales de lumière
Que volent ses 2 L
D’un amour irisé
Comme un vol stationnaire sur le fruit de l’été
Au-dessus de la terre-mangeoire
Pour y puiser la vie pour
Y
Puiser la force pour
Y
Puiser au plus profond
Son renouveau.
Carole Radureau (03/02/2022)