…..l’oiseau qui vole n’a pas de maître…..

La poésie est fille d’Egérie
Et toi
Tu la prends sous ton bras
Avec elle tu voles à tire d’aile
Comme tes ailes brisent le froid
Elles se font hirondelles des frimas
Et rompent la chaîne.

Egérie est une muse
Une fleur des airs
Sous son masque mystérieux
Se cache un cœur de braise
De son bec-pointe-de-fer
Sont écrits de si beaux vers.

Elle trempe cette plume
Dans une encre de mer
Une encore fraîche d’écume toute née et chaude
Bercée par des bras d’aurores
Enfantée par le feu de l’action de Neptune
L’encre est une fusée vers l’au-delà poétique.

La muse est éprise de la sterne
La sterne c’est son pêcher- mignon
Tout comme l’oiseau pêche, la muse veut pêcher
Des vers-crevettes par bancs entiers
Les coucher
Ainsi touts nus sur des pages de papier amate.

Carole Radureau (26/03/2019)

…..accomplir…..

Sueur sous le soleil
Sueur sans peur
Energie décuplée par le sein de Saturne.
Fruit frais.

Mouvement ample
Géographie du corps (muscle-seigneur)
C’est comme éliminer mais avec la joie
Au cœur.

Le soir
Les foins sont rentrés
Les vaches sourient
Dans son logis
La sueur se baigne dans le sirop de sucre
Du travail accompli à temps.

Carole Radureau (26/03/2019)

La récolte des foins à Eragny 1887 de Camille Pissarro

Prenant ce que tu trouves
Un silex un bâton
Fais-en un marteau
Pour marteler les mots.

Sculpte et sculpte encore
La sève féconde de ta brique
Rends-lui forme
Rends-la jolie
Erige la colonne de mots
Comme une seule fourmi dans l’oreille de Rodin.

Arase-les
Abrase-les
De la poussière
Sors une matière première
Qui par le souffle du vent
Se matérialise :
Phrase sublime.

Arrache le cœur du silex
Mords-le avec des dents de fer
Craquèle-le comme lors de l’offrande
Que son jus sacré écrive :
Latex sur le tronc de l’oppression.

Burine, lamine, extraie
Que chaque particule fasse page entière
D’une écriture stylisée
Parchemin de papier d’amate
Que ça sente la pierre qui chauffe
Une qui a ses cuisses calcinées par l’usure
Que ces mots enfantés par elle
Soient des mots à l’encre de tripes.

Tout est bon pour la création
Tout est trésor
Pour l’œuf de la créativité
Collecte, ramasse, ne néglige rien
De cette matière- même puise une sève de vie
De cette matrice-même
Que s’érige la tour de Pise de l’œuvre
Unique.

Ton œuvre.

Carole Radureau (30/03/2019)

Inspiré par l’œuvre de Christian Delacoux La quête du beau

Lignes parallèles
Courbes
Lignes entremêlent
Leur désir d’été
Embrouillaminis comme une jungle en rêve
Avec tant de lianes aimantes sincères
Avec tant de croix.

Branches qui se croisent sans se toucher
Qui finissent par y arriver
Bourgeons qui s’élèvent ensemble
Main dans la main à l’assaut de la canopée
Fruits qui s’ébauchent
Voisin/voisine
Sans querelle de paillasson
Branches qui s’altèrent
Qui vieillissent ensemble
Qui se parent de lichens
Qui se flétrissent qui compatissent.

Les chemins qui se croisent
Telles des branches
N’ont pas toujours le choix
Parfois ils se décroisent
Négligent leur carrefour
Se perdent à jamais
N’ont plus d’intérêt interactif.

Lignes qui épousent la chair du temps
Lignes qui s’adaptent se contournent se lovent enfin
Oubliant la peur du contact
Le peau contre peau l’écorce contre écorce
Le bec contre bec.

Lignes qui ont décidé de cultiver la rencontre
Croisement intersection comme union promise
Fortuite
Généreuse
Sincère
Peau contre peau
Fusion à jamais
Masse d’une canopée
Qui ne cesse de croître.

Carole Radureau (29/03/2019)

Paysage sous bois à l’Hermitage de Camille Pissarro 1879

…..l’oiseau qui vole n’a pas de maître…..


Au plus profond de la forêt pluviale
Un concert de chant retentit :
Gwou –gwou-gwou
Fait-il
Et l’on songe au concert des grenouilles.

Monsieur Mélété le courtisan
Madame le domine d’une tête
C’est elle qui porte la culotte
La culotte mouchetée.

Répondant aux cris de grenouille
Le concert s’éternise jusqu’à l’aube
L’aube de la couvée au ciel étincelant
Le fruit de la pérennité
N’attend pas.

Au plus profond de l’obscurité
Relaxe-toi, songe au calme du moment
La chouette du nom de Mélété
C’est une muse
Pour méditer.

Carole Radureau (29/03/2019)

…..pierres sauvages…..


Délicat comme un défilé de soie
Confortable comme un petit nid douillet
Fileté comme un nez qui a trop menti
Haut perché
Pour dominer le monde
Promontoire-fief des goélands
Habitat des moines de l’aurore
Doucereux comme une journée qui s’achève
Calorique après tant d’heures au soleil
Puissant
Par son magnétisme minéral
Doux aussi par sa peau émerisée
Granuleux comme un thon frais pêché
Subalterne car les oiseaux sont au-dessus de lui.

Carole Radureau (29/03/2019)

Tout doit être fait
Disait ma grand-mère
Et d’accomplir
Sans gémir sans se plaindre
Pain du jour
Soupe de demain
Légumes pour l’hiver
Et les conserves
Ne pas oublier les conserves
Si jamais il y a la guerre.

Tout doit être fait
Sans rechigner
Sans barguigner
Sans mépris de la tache
Sans avoir peur de se salir les mains.

Car
La vie de l’homme est remplie
De taches
A accomplir
Car
Chaque jour suffit à sa peine
Tu ne dois compter que sur toi.

Accomplir pour soit sa famille
C’est une petite consolation
Un sens du devoir hautement poussé
Un sens de la nécessité
Accomplir pour l’autre
Vendre sa force vive sa force de travail
C’est un moindre réconfort
Car vous le savez : l’exploitation de l’homme par l’homme
La plus value et tout ça
Ce n’est pas une fin en soit, non :
Une obligation.

Accomplir
Sans choisir
Quel choix avons-nous ?

Autant le faire avec douceur
Avec intérêt
Au moment présent
Voir une lumière dans le fruit accompli
Voir une lueur dans le repos qui suit.

Carole Radureau (28/03/2019)


Paysan attachant une meule de foin de Camille Pissarro

…..accomplir…..


Retourner la terre
Comme une crêpe
La faire voltiger
Lui briser l’échine
La fracasser.

Qu’elle est dure parfois
Surtout l’argileuse
L’amoureuse
La collante
La gluante
Celle qui sur le loucher
S’accroche
Obstinément.

Aérer la terre
Faire une tranchée
Ne pas la perdre
Et briser et briser
Cette terre avec toute sa petite vie
Parfois qui en sort
En plusieurs morceaux (lombrics, racines de liseron, blancs manteaux).

De beaux légumes pousseront
Car
Quand le lit est fait et bien fait
On aime
A y plonger ses pieds.

Carole Radureau (26/03/2019)


Paysanne bêchant de Camille Pissarro 1880

Donnez-moi le bleu de Pissarro
Un décor tropical
Une bananeraie
Mais ni massacre ni compagnie…..

Donnez-moi cette touche d’exotisme
Ce bleu tendre et pastel
Qui dessine un ailleurs chaud
Et langoureux.

Je n’ai pas la senteur
Ni l’arôme au cœur d’une goutte de ce fruit
Aqueux et sombre
Je n’ai que deux yeux pour admirer le bleu
Du bananier dans sa couronne d’ara hyacinthe.

Le feuillage est un plumage
Son cœur est un bras-le-corps
Son régime est capital
Son âme un précipice propice.

Carole Radureau (21/03/2019)

Bananeros de Camille Pissarro (Venezuela)

…..accomplir……

D’une aiguille faire un sabre
Déchirer le fil du jour
En faire un ciel capitonné.

D’un geste clair
Hisser la toile au sommet
Lui donner un virage
Juste pour l’infini.

Dans le chas entre l’énergie
C’est un brassage de vie
A l’endroit
A l’envers
Levant la tête
La vie surgit
Descendant la tête
Le mouvement s’inscrit
Dans une volonté de l’au-delà.

Carole Radureau (26/03/2019)

Deux femmes cousant dans un intérieur de Camille Pissarro, Venezuela