Inaltérable
Mes doigts aveugles effleurent l’interstice
Et je vois le bourgeon dans le désert
Une bouche murmure la faible lueur
Le vide déploie des ailes d’entrelacs
Comme une larme d’oursin, un sourire de détresse
Comme deux cristaux de mains rajeunissent l’enfance
Incandescente étreinte dont rêvent les cailloux
Baiser d’éternité aux lèvres d’une étoile
Une plume de rose apprivoise les vents
Et dévoile les astres à nos cœurs engourdis
Je flaire les certitudes des fleurs qui s’enlacent
Je résous l’aporie des pierres qui s’embrassent
Si l’amour est ardent pour polir le silex
L’étincelle est un chant au soleil levant
Et les vides se comblent de doux traits de lumières
Pour souffler sur nos âmes la chaleur minérale
Le regard des statues semble peser des siècles
L’éphémère du bonheur affaiblit la fougère
Mais la roche aux entrailles ravive les vigueurs
Comme l’écho d’un ruisseau enivre la cascade
Les pierres qui s’enlacent fécondent le néant
L’interstice est l’amour déposé sur leur joue
Hobo-Lullaby
Le mystère des pierres
Les profondeurs des strates nourrissent les minéraux de demain
Et sur le mur le puzzle assemble les pierres-élues
En un amalgame troublant.
La pierre grise au toucher rugueux
Côtoyait la petite pierre blanche sa voisine.
Elle était là insigne
Pour combler un trou dans l’édifice.
Un jour elle lui confia, complice
La vérité de sa naissance :
Pierre à pierre mot à mot
Leurs histoires qui s’unirent avaient le goût de la minéralité.
Vous savez :
Le goût de la coquille d’huître du Chablis
Qui se nourrit à l’époque du kimméridgien.
Cette histoire ancienne leur avait appris
Qu’avant d’être petite pierre insignifiante
Le petit caillou blanc avait eu un sang noble.
Opale elle était autrefois avant qu’on ne la roule, roule, roule
Dans la terre glaise des champs de lavande.
Elle brillait, elle était reine de la nuit
Dans son cœur poli le sang de sa mère la lune coulait
Abondamment.
Elle était ravissante autrefois et rêvait de finir en beauté
Sur une bague ou dans un collier.
C’était dans la carrière de granite aux éclats brisés par la pioche
Qu’était née la pierre anthracite un soir de mai.
Avec ses sœurs-pierres on l’avait grossièrement taillée
Et rangée sur le mur tel une note sur une partition.
Pour toujours elle serait là, à jouer une chanson à l’unisson de la façade
Irrégulière
Affichant sa face de pierre sans aucun autre espoir rêvé.
La pierre anthracite et la pierre blanche
Leur cœur minéral fondant d’émoi
Se dirent que plus jamais
Ils ne seraient seuls
Sur le mur de l’éternité.
Se tenant côte à côte
Le vent, la pluie, la tempête
Jamais n’eurent prise sur les pierres de la passion :
Les révolutions coulaient comme dans un rêve
Les hommes s’étripaient sans jamais se douter
Que le mur sans opinion cachait d’amoureux frissons.
L’histoire s’écrivit dans la fibre millénaire du temps
Seul détenteur des énigmes de ce monde.
Vous savez…..
Si l’on bouge délicatement la petite pierre
Blanc- de- lait,
Blanc-de- coton
Un tour à droite
Puis un tour à gauche,
De l’autre côté pouvons-nous passer
Pour y voir ce qui se cache derrière le mur des mystères.
Mais ceci est une autre histoire.
Carole Radureau (27/01/2015)