Publié le 16 Novembre 2020
Mère et son bébé (1933), Madeleine Carpentier (1865-1940) (MBA Reims/photo Christian Devleeschauwer)
Petite fille qui grandit loin de nous
Qui sourit pleure et rit
Alors que dans le monde
Chacun s’essouffle.
Elle était née juste avant
Cette grande vague qui se devait d’être
Multiple
Cette inquiétude constante
Ce devoir de précaution
Terrant chacun et chacune chez soit
Sans aucune planche de salut.
C’était une petite-fille rêvée
Une petite-fille imaginaire
Vue par écran interposé
Suivie dans son développement par les clichés
Clichés qui restent figés dans le cœur comme des épées
Clichés qui mettent des larmes aux yeux.
Relativiser c’est la règle
Pour ne pas souffrir, accepter
Mettre autour de son cou le keffieh de la patience
Ebaucher quelques rêves mais juste au moment présent
Rien penser du futur ce futur qui n’est rien d’autre
Qu’un moment présent
Rien penser d’hier qui n’est que du passé dépassé
Il faut sourire au sourire de la petite-fille aimée
Se dire que non, elle n’aura pas pour toute mémoire de nous
Qu’une tête anonyme cachée derrière un masque
Une tête à lui faire monter les larmes aux yeux.
Ce n’est pas que le COVID c’est le MCS
Qui enferme qui embulle qui détruit tous les liens
Comme une peste attrapée au quotidien
Quand ton environnement soudain
S’est refermé sur toi.
Le COVID dépassé reste ce MCS
Se résigner peut-être à voir ses proches derrière une vitre ?
Se laisser envahir par le tomber de bras ?
Le coronavirus est arrivé tel un chien dans un jeu de quilles
Tu n’avais pas encore pris de mesures pour affronter cela
Toutes les quilles sont tombées et rien ne peut dire comment les redresser.
Maintenant la petite-fille et l’autre petite-fille aimée elle aussi puis
Les autres petits à venir
Faudra-t-il lâcher prise aussi sur eux ?
Se dire que loin des yeux
Près du cœur
C’est un bel adage
A cultiver ?
Pour être heureux : vivons cachés lui aussi cet adage
Qui ne dit pas que le bonheur d’exister.
Je serais heureuse de te savoir heureuse petite-fille
Tu as soufflé ta première bougie avec brio
Avec une technique révolutionnaire encore inusitée
Tes jolis yeux bleus tintent dans mon âme
Comme une chanson d’oiseau
Qui, au printemps, tout content
Se dit que la vie est jolie
Qu’il va construire son nid
Y plonger ses œufs dedans
Ensuite c’est le grand boulot qui ne laisse aux parents
Que le temps de sourire à l’éveil des petits.
A la nieta mía Kessy
Carole Radureau (16/11/2020)