aragonite

Publié le 20 Janvier 2016

Entre la haine et l’amour

Il y a mes larmes quotidiennes

Mon désespoir et mes courbatures

Les bâillements du soleil n’ont plus leur place

Je suis l’enfant qui toise l’invraisemblance

Le rocher qui montre son cul aux marées cupides

Je ne suis pas un phare

Pourtant je pleure mes vieux rafiots

Qui fracassent leur beau temps

Brisant leur boussole

Sur cette anamorphose

Et si tu partais vingt longues années

Je serai ton Argos

Toi qui est mon Ithaque

Qui ne le savais pas

 

Hobo-Lullaby

 

 

 

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Rédigé par caro et hobo

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Publié le 5 Janvier 2016

Adresses inconnues

Poésie à deux mains

 

 

Sur cette terre il y a de la place pour tout ce qui vit et boit dans la rivière le lait des pierres d’opale

Le chemin tourne le dos à qui le fuit car sur son sol le sang a écrit des lettres indéchiffrables

Nous voyageons comme tout le monde mais l’heure ne sonne jamais sur l’horloge calcaire du retour

Dans les gares les derniers trains s’arrêtent et déversent leur flot ininterrompu d’égarés en l’absence, de funambules qui glissent et trébuchent sur le fil détendu de leur avenir

Tu avais choisi les roses de la haie, les piquants des fleurs reines qui écrivent dans les livres leurs traces embellies, leur sang de nacre était la nacelle recevant comme un enfant le sucre de tes mots

Mais, plus rares sont les roses de Palestine quand l’eau de la terre bénie ne sait plus où elle doit couler pour irriguer les naissances

Jusqu’au bout de ton cœur tu as parcouru les chemins qui menaient aux inconnus qui ne connaissaient pas le goût de ta chair épicée des pierres de ton pays

Les distances pleuraient comme des perles de cristal tombées des sacrifices en avalanches

Les papillons étaient des dates confuses dans les calendriers qui ne savaient plus leurs noms

Les papillons étaient les dattes au régime desquels les chairs avaient perdu leur fondant

Sur la dernière bouffée d’air tu écrivais et sans jamais te lasser en y croyant toujours car la terre Palestine était la rose des vents destinée à le voir tourner un jour.

 

Une urne pour préserver nos âmes de la poussière du temps

Roses contraires, roses propices.

Vous avez vos gloires, nous avons les nôtres. Ah, ce pays dont

Nous ne voyons que ce qui ne se voit pas : notre secret.

Gloire à nous : trône sur des pieds gercés par les chemins qui

Nous ont conduits à toute maison, sauf la nôtre !

A l’âme de trouver l’âme dans son âme, ou mourir ici….

 

Carole Radureau (05/01/2015) et Mahmoud Darwich, Nous marchons vers un pays (recueil Plus rares sont les roses, partie reprise en italique)

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Rédigé par caro et hobo

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Publié le 3 Mai 2015

LES LARMES DE PABLO

Dans le silence d’un cimetière de volcans
Souffle une fièvre poivrée
Regorgeant de convoitise
Voguent déjà les cales Andalouses
L’orangé des soleils couchants pâlit
Dans l’innocence d’un solstice 
Déjà les cupides solerets
Ecorchent la quiétude des rivages

Déjà ton chant ouvrait les yeux

Les hêtres pleurent la disparition des vents lucides
Dans les bouches s’estompe la vigueur du sel
Cette laisse trop courte au cou des Alpagas
Fane l’espoir des fleurs, la confiance des neiges
Les inexorables nuages aux syntaxes de plomb
Meurtrissent les mains tendues
Faisant couler l’acier aux joues des fleurs sincères

Déjà ton sanglot étanchait les consciences

Avril fleurissait chaque grain de sable
Dans les gènes du temps, le secret des déserts
L’océan n’habitait pas encore les yeux du Guanaco
Le tranchant de l’or n’avait pas rompu
L’amour qui nous sert d’amarre

Déjà dans la pierre tu ciselais l’avenir

Alors quand la cohérence du pain
Emiettera l’éthique des servitudes
Quand psaumes et sourates en auront fini de la nuit
Entre le rauque fracas des absences et la capture des rêves
Comme le libre nuage, dérober au vent ses chevaux
Boire le lait de la terre aux larmes de chamelle
Car le sel profond engendre les océans fertiles
Il est notre héritage


Prends ce sel Pablo
Portes le à la bouche des siècles
Ravive la lueur dans les yeux de l’horizon
Offre ce pain à l’avenir des sentiers
Ranime la présence du vent salutaire
Fais glisser une brume de cœur sur la joue de nos souffrances
Comme tu as déversé tes larmes sur le désert d’Atacama.

Hobo Lullaby

Il ne savait pas que nous étions ses graines

LA PIERRE DE PABLO

La petite fille a grandi puisant dans la sève d’un coquelicot
Le poids de son fardeau.
Dans le verre d’un poète un jour elle trempa ses lèvres hésitantes
Elles y restèrent collées à jamais.
Il fallu un jour prendre de la hauteur.
Les cimes andines ouvraient leur cœur
Je m’y plongeais ravie portée par le courant des ondes du condor.
Si la feuille un jour dessina son trajet sur le parchemin de sa cambrure
J’ai suivi une à une ses troublantes nervures.
Dans les odes la simplicité des jours sans orages
Nous lisons à travers les corsages pour y puiser de ténébreux frissons.
Sur le chemin de la rose je trouvai la pierre de Pablo.
Infini était son propos, lancinantes les questions clamées haut dont les réponses
N’étaient pourtant pas inconnues.
Sur le chemin des pierres, le grain signe un parcours que l’on suit sans mot dire
La vérité est dans sa fibre. Ensuite il faut choisir.
J’ai écouté de toutes mes oreilles si on allumait les étoiles dans le ciel
Un chant de rossignol répondit à l’écho.
Chaque note avait un but, chaque son portait en lui une évidence.
Il était le mot-clé puisé dans la poésie de Pablo.
J’ai partagé le cours de ma vie en suivant le cours de sa poésie
Chaque mot construisit l’édifice porté par le surréalisme de ceux qui vivent à travers
Un songe.
Chaque leçon apprise forgea dans ma matière
Une géographie à jamais retenue. Une majestueuse planète terre
Sur laquelle règnent douceur, humanisme et tendresse
Sur laquelle règnent attention, paix et ivresse
Sur laquelle règne en son grand cœur de troubadour le simple mot de l’amour.
Car l’amour c’est une canne qui porte un corps en souffrance
Car l’amour c’est un sourire dans un champ de fleurs indifférentes
Car l’amour c’est une fougère qui agite tendrement les spores de sa descendance
En fêtant sans outrance la légèreté de l’être
Quand la fusion des âmes entre à jamais dans l’écriture de l’histoire.
……. ……… …….. …….. ………

Un jour, je me coucherai sur un lit de terre-mère
Je fermerai à jamais mes paupières de fer
Que mon corps préparé fusionne avec ce qui un jour le porta
Que mon corps fatigué s’éteigne avec lenteur
Dans cette matière première
Sur une vie bien remplie mais toujours à la recherche
De son tendre mot-frère.

Carole Radureau (02/03/2015)

Il ne savait pas que nous étions ses graines

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Rédigé par caro et hobo

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Publié le 13 Avril 2014

Pour l'envie de Pablo Neruda - Extraits choisis -

image

Peut-être l’homme grandit-il sans respecter,

comme l’arbre de la forêt, la volonté

du monde qui l’entoure,

et voici que soudain

s’il était la racine il est aussi la nuit

et s’il produit des fruits il donne aussi de l’ombre.

Ombre et nuit que le temps et le feuillage

abandonnèrent en grandissant,

tant et si bien que depuis cette humidité inerte

où les germinations attendent

on ne distingue plus les doigts de la lumière :

oui, le soleil gratuit fut refusé

à la graine affamée

et l’âme, en pleine nuit, déchaîne

une croissance tourmentée.

Extrait choisi par Serge-Hobo

***

Pour l'envie de Pablo Neruda - Extraits choisis -

image françois c

Je sors pour être ce que j’aime, la présence

nue du soleil sur le rocher,

pour être ce qui pousse et pousse sans savoir

qu’il ne peut abolir sa croissance :

le blé donner le grain : être innombrable

sans raison : car c’est ce qui lui fut ordonné :

sans ordre, sans commandement,

et, parmi ces choses-là qui ne se partagent,

cette secrète volonté, peut-être,

cette trépidation du pain, du sable,

ont-elles réussi à imposer leur condition

et ne suis-je moi que matière vivante

qui fermente et qui lève ses insignes

dans la fécondation de chaque jour.

Extrait choisi par Caro

**

Pour l'envie de Pablo Neruda (Mémorial de l’île noire)

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Rédigé par caro et hobo

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Publié le 13 Septembre 2013

Canto humano
Il entre dans la forêt. Celle-ci balbutie d’étonnement…..

Des mots cambrure de lyre transpirent des fougères

M’emmènent par la main voir ma première aube

Je gravirai la verticalité de ces rimes pour qu’ils m’ouvrent les yeux

Leurs regards apaisant déposeront mon désir au creux d’un nuage

Et mon cœur sur la mousse d’un sous bois

Mes mains écorchées saisiront l’originelle obsidienne

Pour transcrire dans mon sang cette mélopée indienne

J’irai crier aux hommes ce message éternel

La terre mouillée d’orage exhale une courbe amoureuse

Comme un secret avenir qui s’enrichit d’humus

Et lorsque son doux regard initiatique s'est posé sur moi

Je regardai Pablo comme on regarde un père

Elle pose le pied au Chili. La terre ne tremble pas……
Canto humano

Au cœur de l’Araucanie une rose trempée

Transpire le cuir, la sueur et le sang d’une petite patrie

Au cœur de la sombre forêt, enfoui dans une niche humifère

Je trouvai le caillou aux mots universels gravés

Croquant dans la matière je pris à jamais en moi une tranche de Chili

D’un coup les rimes fleurirent sous le lait du copihue, la farine et le miel

Je mordais à pleines dents l’écume de son océan

Et d’un pas hésitant j’abordais les pentes rocailleuses de la Cordillère

La germination fut lente telle la sève qui grimpe à l’assaut de l’araucaria

Pourtant un jour comme une évidence le cristal jaillit sous mes pas

C’était écrit dans la pierre partageuse de la poésie :

Pablo, mon ami, tu m’as tout appris

Canto humano
Hobo et Caro

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Rédigé par caro et hobo

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Publié le 31 Août 2013

......Nos poèmes doivent distinguer avant tout le monde l'ennemi qui approche.......
Sur les traces du géant aux yeux bleus

Mes frères,
couplés au bœuf décharné, nos poèmes
doivent pouvoir labourer la terre,
pénétrer jusqu’au genou
dans les marais des rizières,
poser toutes les questions,
rassembler toutes les lumières.
Telles des bornes kilométriques, nos poèmes
doivent distinguer avant tout le monde
l’ennemi qui approche,
battre le tam-tam dans la jungle.
Et jusqu’à ce qu’il ne reste plus sur terre
un seul pays captif, un seul prisonnier,
ni dans le ciel, un seul nuage atomisé,
tout ce qu’ils possèdent,
leur intelligence et leur pensée, toute leur vie,
pour la grande liberté, nos poèmes.

Nazim Hikmet

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NAZIM
Sur les traces du géant aux yeux bleus

Quand le géant reviendra-t-il ?

L’amour des hommes est en exil

Toi Nazim, le frère des hommes

Quand reviendras tu embrasser

Cet arbre qui même à l’automne

Porte les fruits de cette terre

Que tu n’as jamais retrouvé

Lorsque nos pleurs furent mis en perce

Par les bâtisseurs de prison

Il suffisait d’une simple averse

Pour que la nuit devienne tendresse

Par la blancheur d’un doux flocon

Les soutes de l’Anatolie

Grondent d’un chant de pionnier

Donnant des yeux de renoncule

A des milliers de prisonniers

Afin d’ étoiler leurs cellules

Après l’angoisse des soirs pendus

L’aube renait comme une évidence

la naïveté se fait vaillance

L’enfance devient une vertu

Pour remordre tout ces fruits perdus

Bien des questions philosophiques

Résonnent dans le creux de tes mots

Scorpion qui tue, mouton qu’abdique

Mais dans le miroir d’un ruisseau

L’homme redeviendra-t-il beau ?

Les bombes seront toujours immondes

Elles donnent la patte aux idées courtes

Toi tu offres aux enfants du monde

une terre ronde comme une yourte

Tes fils ont les amours fécondes

Ton sourire est invitation

A planer sur l’immensité

Et effleurer du bout des ailes

Les épis de la liberté

De ces grands champs en floraison

Tes yeux bleus se rouvriront-ils ?

L’humanité est en exil

Hobo-Lullaby

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La rose ottomane

Les mots du poète

Raison d’être

Fusent

Projectiles rimés

Des prisons d’acier

Sur les traces du géant aux yeux bleus

La rose ottomane

Aux pétales diaphanes

Argumente

Les pensées aimantes

De Nazim à l’âme pure

Qui jamais n’épure

Son cœur généreux

Les mains qui caressent

Volonté d’ivresse

La bouche décidée

A ne mots garder

Les liens qui se tissent

Solides et complices

Baume d’amitié

Contre maux glacés

Le rubis de son cœur

Émouvante rougeur

Ardente ferveur

Dans les vers

De la pierre

Grave la poésie

De l’homme averti

Le sable du désert

Le sang qui se perd

L’injustice criée

Du poète enfermé

Jamais ne vaincrons

L’aigle volontaire

Qui tient dans ses serres

La clé

Lovée

Camouflée

Bien au chaud gardée :

Matrice de l’humanité.

Carole Radureau (16/08/2013)
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........Oui, Nazim était un grand jour doré.......
Sur les traces du géant aux yeux bleus

Qu’avons-nous perdu vous et moi,

quand Nazim Hikmet est tombé comme une tour,

comme une tour bleue qui s’écroule ?

Il me semble parfois

que le soleil s’en est allé avec lui qui était le jour,

oui, Nazim était un grand jour doré

qui remplit son devoir de renaître à chaque aube

malgré les chaînes et les châtiments :

Adieu, lumineux compagnon !

Délicieux Savitch entre Saint-Basile

et les maisons nouvelles de l’Aéroport,

ou dans le quartier d’Arbat, mystérieux encore,

transvasant mon vin chilien, le versant

dans la peau de tambour de son langage.

Savitch, avec toi s’est perdue

l’abeille d’or

qui créa le miel de ma ruche !

Mon doux ami, limpide camarade !

Pablo Neruda (La rose détachée)
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........Vos mains qui cachent sous leur peau rude l’affection et l’amitié.......

Vos mains graves comme les pierres,

tristes comme les airs chantés dans les prisons,

lourdes, massives comme des bêtes de somme,

vos mains qui ressemblent au visage chagrin des

gosses affamés !

Sur les traces du géant aux yeux bleus

Vos mains légères, habiles comme les abeilles,

chargées comme les mamelles de lait,

courageuses comme la nature,

vos mains qui cachent sous leur peau rude l’affection

et l’amitié.

Notre planète ne tient pas entre les cornes d’un bœuf,

elle tient entre vos mains.

Ah les hommes, nos hommes à nous,

on vous nourrit de mensonges,

alors qu’affamés

il vous faut du pain, de la viande.

Vous quittez ce monde aux branches lourdes de

fruits

sans avoir mangé une seule fois une nappe blanche.

Ah les hommes, nos hommes à nous,

surtout ceux d’Asie, d’Afrique,

du Moyen et du Proche-Orient,

des îles du Pacifique,

et ceux de mon pays,

c’est-à-dire plus de soixante-dix pour cent des

hommes,

vous êtes indifférents, vous êtes vieux comme vos

mains,

vous êtes curieux, admiratifs, vous êtes jeunes comme

vos mains…..

Ah les hommes, nos hommes à nous,

mon frère d’Espagne ou d’Amérique,

tu es alerte, tu es audacieux,

et tu oublies vite, comme tes mains,

tu te laisses abuser, comme tes mains

tu te laisses vite avoir….

Ah les hommes, nos hommes à nous,

si elles mentent les antennes,

si elles mentent, les rotatives,

s’ils mentent, les livres,

s’ils mentent, l’affiche, l’avis sur la colonne,

si elles mentent sur l’écran,

les jambes nues des filles,

si la prière ment,

si elle ment, la berceuse,

s’il ment, le rêve,

s’il ment, le violoniste dans le cabaret,

s’il ment le clair de lune

dans les nuits de nos jours désespérés,

si elle ment, la voix,

si elle ment la parole,

si tout le monde et toutes les choses mentent

à l’exception de vos mains,

c’est pour qu’elles soient dociles comme l’argile

aveugles comme les ténèbres,

idiotes comme le chien du berger,

et pour que ne se révoltent pas vos mains,

et pour que ne finisse pas cette tyrannie,

ce règne du trafiquant,

en ce monde où la mort nous attend,

en ce monde où il ferait si bon vivre…..

Sur les traces du géant aux yeux bleus
Nazim Hikmet 1949

( Il neige dans la nuit et autres poèmes, traduction Munevver Andaç et Guzine Dino)

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Rédigé par caro et hobo

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