pierre d'antan

Publié le 12 Avril 2019

……souvenirs d’enfance…….

Si loin si près
Comme un décor
Comme un espace intouchable
Indésirable
Lieu de la mécanique du cambouis
Du débarquement du chambardement
Du bombardement
Lieu de travail
Comme une usine
Mais en milieu ouvert
Même sombre sensation de douleur
Même sombre sentiment d’enfermement
Même sombre certitude de ne pas y aller.

Pourtant c’était là où mon grand-père travaillait
Et mon oncle Dédé (l’homme à l’harmonica)
C’était leur espace à eux
Leurs souvenirs
Leurs bons et mauvais moments
Quelques bribes mais très fines de leur vie de travailleurs
Suaient parfois
Dans les conversations
Ou bien ne les retenais-je pas……..

Du port de Rouen je n’ai en tête
Que souvenirs de grèves des dockers
Les cartons de bananes pourrissant sur les quais
Déposées dans le domaine public
Et ces jours-là chaque habitant était grand consommateur
De fruit exotique,
Du port de Rouen je n’ai en tête
Que le bruit et la furie
24 heures durant des 24 heures motonautiques
Tout ça pour ça !
Du port de Rouen je n’ai en tête
Que ce renouveau offert à lui ces dernières décennies
Quand s’invitent
Sur les quais autrefois abandonnés
Des gréements, des trois-mâts, des porte-avions
De beaux bateaux alignés sur deux quais
Et des foules de gens faisant la queue pour grimper
Sur ces ponts
S’imaginer corsaire ou bien capitaine ou bien mousse
Ou bien se dire comme ces merveilleux bateaux
Ont servi à parfaire la colonisation mais ceci est une autre histoire.

Le port de Rouen comme tout port
Est une porte
Ouverte
Sur l’ailleurs
Sur le départ
Sur l’arrivée
Sur le transit
Sur le partage
De bonnes comme de mauvaises choses
Sur l’au-delà qui semble toujours mieux que l’ici-maintenant.

Ce poème existe pour y coucher la mémoire
Quelques images anciennes ont déclaré : il faut écrire
Ce port est une partie de ton histoire
En ligne de mire de ta jeune vie
Il était et n’était pas
Cela suffit pour le dire, l’écrire
Maintenant.

Carole Radureau (12/04/2019)

Port de Rouen avec cheminées de Camille Pissarro 1885




Par Camille Pissarro — British Museum [1], Domaine public, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=14958577

Par Camille Pissarro — British Museum [1], Domaine public, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=14958577

Port de Rouen de Camille Pissarro 1885  — British Museum [1], Domaine public, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=14958619

Port de Rouen de Camille Pissarro 1885 — British Museum [1], Domaine public, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=14958619

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Rédigé par caro et hobo

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Publié le 24 Mars 2019

Saisir son cœur
Sa plume son antériorité
Ses petites rues parfois malfamées
La rue des Bons Enfants, coupe-gorge moyenâgeux
La rue Eau-de-Robec, la rue Malpalu, la rue du Champ des Oiseaux (quand j’étais enfant entendre ce nom me faisait rêver)
La rue de l’Epicerie (peinture).

Autour de la cathédrale
Une ambiance règne
C’est sombre
C’est humide
Et pourtant lumineux
Il y a toute cette sombritude liée au religieux
Au gothique, ce moyenâgeux retranscrit par les pavés par les murs
Les façades les ornements les gargouilles
Il y a cet environnement de curés, de sœurs, de moines
…..(toutes ces soutanes de mon enfance)…..
Tous ces clochers, la ville aux cent clochers
St Maclou, St Romain, le Sacré Cœur, St Vivien …..

Le peintre a saisi la lumière dans l’ombre
La couleur qui sait se faire fleur en automne
Une qui puise dans le cours du fleuve
Une auréole, un soupçon de vie
Le gris des pavés fait trébucher l’aurore
On se prend à lever la tête
Et là merveille :
Le Gros-Horloge et sa petite vie tintinnabulante.

Rouen où je suis née
Où aimait à se rendre mes grand-parents bienaimés
Le clos, sorte de puces rouennaises
Le parvis de la cathédrale et la rue piétonne
Toujours noire de monde
Le vieux marché (place Jeanne d’Arc)
La ville de Maupassant, de Flaubert
De Jeanne d’Arc au bûcher
Au son des cloches la vieille ville vibre
Elle sort doucement de sa torpeur
Ses maisons à colombage craquent quand la chaleur est reine
Mais l’humidité est malgré tout présente
Cette grisaille au cœur
Pissarro la révèle sous des couleurs chaudes pour l’époque
Pissarro a peint un Rouen chaud.

Rouen ma ville de naissance
Non ma ville de cœur
Je ne me sens pas normande il y a
Juste ma famille mais je n’y sens pas de racines
Juste une mémoire que je ne souhaite pas cultiver
La ville est un héritage de l’ancien temps
Tout en elle est fixé sur « autrefois »
Pour autant la ville est belle
Il faut la regarder avec des yeux d’aujourd’hui
Ne rien voir d’autre que son cœur pur
Son histoire ses traces de pas ses luttes ses querelles
Tout ce qui fait d’une ville ancienne
Le siège d’une culture, d’une civilisation.

Carole Radureau (21/03/2019)

Rouen, rue de épicerie, 1898 de Camille Pissarro

Par Camille Pissarro — The Yorck Project (2002) 10.000 Meisterwerke der Malerei (DVD-ROM), distributed by DIRECTMEDIA Publishing GmbH. ISBN : 3936122202., Domaine public, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=156473

Par Camille Pissarro — The Yorck Project (2002) 10.000 Meisterwerke der Malerei (DVD-ROM), distributed by DIRECTMEDIA Publishing GmbH. ISBN : 3936122202., Domaine public, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=156473

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Publié le 10 Mars 2019

Les trous aux chaussettes
Ce sont des passe-vents
Qui tirent le froid par les dents
Laissant entrer la nuit de l’hiver.

Reprise tes chaussettes !
Ne reste pas comme ça
Ton orteil qui prend froid
C’est la mort assurée.

Tu ne sais pas repriser ?
Ta grand-mère ne t’a pas appris ?
C’est un comble un vrai défi
Maintenant pour un trou c’est la poubelle.

Mais les chaussettes ne sont plus celles
Qui piquent
Qui tombent
Qui piquent
Qui ne sont pas très belles
Mais qui tiennent chaud
A ces pieds portant nos destinées.

Moi j’ai une corbeille de chaussettes
A repriser
Avec ma grand-mère, on se donne la main
Un point serré qui en vaut deux :
Non je ne sais pas
Je ne sais plus
La chaussette moderne ne joue pas le jeu
Donnez-moi de la laine de lama
Je veux de la bonne fibre
De la chaude, de l’ortie, du chanvre
Pas un poil de cheveu, pas un fil en plastique, un nylon baveux !

J’écris à la mémoire d’un vendeur de chaussettes
Un Arménien dans le port du Pirée
Il était ami avec le vendeur d’oranges et de citrons
Ils se racontaient des histoires de chaussettes et citrons
Sous le soleil
C’est dans la poésie de Ritsos
Le vendeur de chaussettes
Celui qui apporte la chaleur dans le cœur
Le vendeur d’oranges
Celui qui apporte la vigueur dans le corps.

Mais les chaussettes ne sont plus ce qu’elles étaient
Des avec lesquelles on imagine ses pieds des requins précis
Longeant les côtes déchiquetées à l’affût de diamants
Des avec lesquelles on respire l’animale sueur-chaleur de la bergerie
Quand on dénoue la laine et que l’effluve tendre chatouille les narines
Des avec lesquelles on se croit bateau à fond plat qui marche sur l’eau
Qui traverse l’océan sur les pas des géants
Des avec lesquelles on devient roi de la terre avec des pieds couronnés
Par l’alpaga du Sapa Inca.

Elle est double la beauté
Elle va deux par deux
Elle est double la misère
Et si l’une à un trou l’autre en veut un aussi.

Alors, reprise tes chaussettes !
Avec le trou fait un vœu
La poubelle n’a que faire
De tous ses trous dans ses fonds.

Carole Radureau (09/03/2019)

Peinture de Van Gogh

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