Publié le 10 Avril 2020
La poésie est une force, la poésie est une arme, je ne sais pas si elle est chargée de futur car pour l’instant le moment présent me guide, la poésie peut-elle en ses mots dénoncer, la poésie peut-elle en sa substance du doigt, montrer ?
Il n’y a que de dire, il n’y a que d’écrire, bien au chaud dans son chez soi, confiné mais pas trop car le frigo n’est pas vide et qu’il y a un espoir d’un lendemain plus frais avec des sourires dans les plats.
Mais il est des confinements douloureux, de ceux qui manquent déjà de tout, de ceux qui ont déjà si peu que le confinement devient prison, il y a des enfants qui n’avaient qu’un repas par jour, c’était le repas de la cantine et ça nous le savons, il y a des personnes précaires pour lesquelles le confinement les prive d’un travail plus que nécessaire pour survivre et il y a ceux qui n’ont que la rue pour maison, que l’entraide ou la solidarité pour secours, il y a toutes ces inégalités qui sont les nôtres ici-même, qui sont les mêmes ici-partout.
Les exclus du système sont ceux qui sont touchés, les exclus du système sont ceux en mauvaise santé, le virus ne trie pas il avance, il fait ce qu’il sait faire, avançant dans des corps déjà fragilisés.
L’injustice est criante et le virus, lui, sans faire de bruit, sans mots, sans poésie, il la révèle au grand jour sans écran publicitaire, sans image-choc de la famine dans le monde, sans image-choc de l’observatoire des inégalités.
Le virus, c’est un révélateur, un indicateur, un montreur du doigt, il met tout à plat, il ne juge pas, non, c’est à nous de juger mais pourtant nous savions tout cela, mais pourtant les politiques savaient tout cela, lui, le virus, il est comme un gros poil à gratter dans le menton des puissants, mais cela sert-il à quelque chose quand la misère est là, que le virus l’aplanit, et qu’après les morts, qu’après la peur, tout recommence en décalquant sans aucun doute le jour d’avant comme s’il était un jour enviable pour tous ces exclus, pour la planète, pour le monde qui vit ?
La poésie ne sait-elle pas qu’elle peut dans son corps dans son âme porter le cri de leurs yeux, lever des nuées d’oiseaux disséminateurs de ces dons ?
La poésie ne sait-elle pas qu’elle pourrait par exemple envoyer des SOS portés par le bec des oiseaux ?
La poésie ne sait-elle pas qu’elle pourrait être lue ?
La poésie ne sait-elle pas qu’elle est la sœur de tous les exclus ?
La poésie sait que si le texte est couché tout en travers de cette page, c’est pour qu’elle diffuse de toutes ses forces sa sève salvatrice, sa sève énergisante, sa sève de pleine conscience, sa grande force révélatrice.
Carole Radureau (10/04/2020)