La vie les montagnes russes
Un chemin qui oublie d’être droit
Une vie à se sauver en quel endroit
Le bonheur existe-t-il -y en a-t-il un sur terre
Une oasis - un nuage- une terre franche ?
La peur aux fesses prend une apparence néfaste
La guerre- les conflits- l’insécurité- l’absence d’avenir
On lance les dés sur le tapis gris poussière
A trois l’on part, on part tenter sa chance.
Mais où est l’Eldorado- est-il un Eldorado ?
Mais où ancrer son être - comme le chemin est long
Tout au long des pirates - des tempêtes - des narco - des racistes
Tout au long du chemin cette peur au ventre cette incertitude du
Lendemain
Se réveiller dans l’autre monde
Ne plus se réveiller car comment faire
Pour survivre dans la jungle - pour survivre se rongeant les ongles
Seule nourriture encore fréquentable.
Ils sont partis nul n’a pu les retenir
Le mari, l’enfant, la sœur, le père
Pour faire fortune- pour tout simplement changer de vie
La penser meilleure que ce qu’on laisse derrière soit
Mais derrière soit, c’est dur certes - c’est difficile
Mais c’est connu- mais c’est le territoire- mais c’est la racine
Mais derrière soit c’est un moment présent qui n’est ni bon ni mauvais
Car en toute montagne russe
Il y a une montée et une descente qui fait toujours mal
Attendant sans certitude la remontée qui arrive un jour ou l’autre
C’est certain elle arrive, pour chacun, la remontée
C’est ainsi que la vie est faite
Jamais tout rose - jamais tout plat
Jamais tout noir - jamais tout triste.
Ils sont partis maintenant
Plus de nouvelles
Les frontières se sont tues
Les yeux se sont voilés
Ils sont partis - ne sont jamais arrivés
Plus de nouvelles
Part la caravane des mamans de migrants
Cherche la piste - cherche les traces - questionne- remue - interroge
Creuse peut-être
La vérité est souvent enterrée
Il y a des fosses de vérité pure dormant six pieds sous terre
Avec une écharpe- un bracelet en haricots frijoles
Un keffieh- un huipil de la reconnaissance
Qui font mal quand la terre se retourne enfin sur la vérité.
Ils ont tenté- ils y ont cru
Et le cœur de la maman saigne
Le cœur du papa saigne
La famille en deuil à jamais car les disparus parfois
Ne s’atteignent pas
On les cherche en vain- mais qu’en ont-ils fait
Mais où chercher toutes ces fosses découvertes où chacun dort
Dans l’ignorance dans l’injustice dans le non oubli des cœurs.
Il faut chercher parfois une lueur
On peut faire son deuil
Certes il ou elle est mort mais on s’en doutait- comment ne pas s’en douter
Tant d’histoires- tant de traces- tant de deuils- tant d’obstacles- tant de cris- tant de haines
Le deuil quand il se fait pose une pierre sur le corps qui dort enfin chez lui avec ses proches
Le deuil peut se faire mais la justice ne doit pas manquer
Tant d’injustices six pieds sous terre
Tant de corps qui ne reposeront pas dans leurs souliers de terre-mère
Dans leur humus dans leur cocon, entourés des leurs.
La vie est ainsi faite que de montagnes russes en montagnes russes
Sont emballés empaquetés à la va-vite los desaparecidos
Ils n’entreront dans aucuns chiffres et les données seront absentes
Comme leurs restes recherchés tels des trésors profonds.
Ils seront disparus - faits disparaître - décomptés - non nés - non morts
Des points d’interrogation entre ici et là-bas
Où le nuage a ouvert une brèche
Ou la terre a envie de mordre
Où les familles ne sèchent jamais leurs larmes
Car ils leur en manquent un ou une
Car il en manque tant et tant que la lune est en deuil
Qu’elle aussi veut disparaître.
Carole Radureau (21/12/2019)