Publié le 20 Octobre 2017
Je suis assis sur les morts
Qui se sont tus pendant deux mois.
J’embrasse des souliers vides
Et j’empoigne rageusement
La main du cœur
Et l’âme qui le maintient.
Que ma voix s’élève aux montagnes,
Descende à la terre et tonne :
C’est ce que demande ma gorge,
Maintenant et depuis toujours.
Approche-toi de ma clameur,
Peuple du même lait que moi,
Arbre qui, dans tes racines,
Me retiens prisonnier,
Car je suis ici pour t’aimer,
Je suis ici pour te défendre,
Avec mon sang, avec ma bouche,
Comme avec deux fusils fidèles.
Si je suis sorti de la terre,
Si je suis né d’un ventre humain,
Misérable, avec pauvreté,
Je n’existe que pour me faire
Rossignol de la misère,
Echo de ton mauvais sort,
Pour chanter et répéter
A tout venant qui m’écoute
Les peines des pauvres gens
Et tout ce qui touche à la terre.
Hier le peuple se leva
Nu et sans rien pour se vêtir,
Famélique, et sans rien à manger,
Le jour qui se lève aujourd’hui
Est de justice orageuse,
De justice ensanglantée.
Dans sa main les fusils
Se changent en lions,
Pour en finir avec les fauves
Qui l’ont été tant de fois.
Même si te manquent les armes,
Peuple aux cent mille pouvoirs,
Que tes os ne s’ébranlent pas,
Châtie celui qui te blesse,
Il te reste encore des poings,
Des ongles, de la salive -, il te reste
Des attributs mâles et des dents.
Brave comme le vent brave,
Léger comme l’air léger,
Assassine qui t’assassine,
Hais celui qui te hait
La paix de ton cœur
Est le ventre de tes femmes.
Qu’on ne te blesse pas dans le dos,
Vis face à l’ennemi et meurs
La poitrine ouverte aux balles,
Large comme une muraille.
Je chante avec ma voix en deuil,
Mon peuple, je chante tes héros,
Tes angoisses qui sont les miennes
Et tes malheurs composés
Du même métal que mes pleurs,
Tes peines de la même trempe
Et taillées dans le même bois,
Tes pensées, filles de mon front,
Ton cœur qui est avec sang,
Ta douleur avec mes lauriers.
Rempart au bord du néant,
Cette vie me ressemble.
Je suis ici pour vivre,
Tant que mon âme résonnera,
Et je suis ici pour mourir,
Quand mon heure arrivera,
Aux sources profondes du peuple,
Maintenant et depuis toujours.
Plusieurs gorgées font la vie,
Et une seule gorgée fait la mort.
Miguel Hernández traduction par Rolland-Simon pour le journal Commune juillet 1937
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Les vents du peuple me portent - coco Magnanville
Les vents du peuple me portent les vents du peuple me traînent me déchirent le cœur et me dessèchent la gorge. Face au châtiment les bœufs abaissent le front, impuissants et calmes : les lion...
http://cocomagnanville.over-blog.com/2014/03/les-vents-du-peuple-me-portent.html
une autre poème de Miguel, plus connu qui a inspiré la chanson ci-dessus