Yeux d’or
Publié le 15 Janvier 2023
Par Becky Matsubara: original work; TAM: crop — File:Circus cyaneus male perched Berkeley.jpeg, CC BY-SA 4.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=67375954
La pierre pensait
Ne pas avoir de rivale
La pierre pensait
La rondeur est ma force
C’était sans compter sur l’oiseau
Sur son œil d’opale
Jaune comme le sang de dame Soleil.
Elle essayait de faire de même,
La pierre,
Là-bas
Dans ses profondeurs
Cristallisant au gré des siècles
Imaginant un monde féérique.
Yeux d’or regardait ça de loin
Dans son âme dans son cœur
La terre battait comme un tambour
Mille grains de cristal conjuguaient
Le mot aimer.
Il aimait songer comme la terre
L’avait
Précieusement doté :
Posant son regard sur la proie
Il l’inondait d’une pluie d’or
Fumant dans les vapeurs matinales.
Maigre satisfaction
De devoir mourir sous les serres
De celui aux yeux d’or
Avec son regard chaud et froid
Avec son regard intransigeant.
La pierre, elle, n’avait pas ce problème
Elle tricotait son décor
A l’intérieur de minéraux moins
Translucides
Plus rustiques plus costauds
Seuls à pouvoir protéger en son cœur,
Les trésors.
Elle voulait créer des billes, la pierre
Elle voulait déjà inventer
Les pierres roulées si célèbres de nos jours
Si proches en même temps si loin
De leur décor premier
De leur première apparence
De leur aspect brut.
Brute.
C’était là une sorte de gros mot
Qui faisait défaut au commerce
On l’attribuait aussi aux rapaces
Jugés brutaux dans leur audace affamée.
La pierre était secouée
A l’idée que l’on vienne un jour
Lointain, très lointain
Triturer en son sein
Son décor magique
En tirer un lait de cristal
Etalé dans toutes les vitrines.
C’est magnifique il est vrai
Nous aimons savoir cela
Mais n’aurait-il pas mieux valu
Que le cœur profond de la terre
Reste coi ?
Que la rondeur visuelle de Yeux d’or
Reste une mappemonde universelle
Faisant le tour de la terre
D’un seul regard ?
Jaugeant le potentiel
Ce qui manque au repas
Juste parce que c’est ainsi
Que va la vie.
Il y avait un ordre dans le monde
Tout semblait parfait
Créateur de beautés somptueuses
Pour qui, pour qui ?
A tout détruire à accaparer
Tant de richesses
Se croient-ils dieux ou personnages importants ?
Pas plus que le ventre de la terre
Qui gargouille de merveilles.
Pas plus que Yeux d’or
Qui chasse sans s’en faire.
Pas plus que la fleur qui naît
Dans le creux d’une faille volcanique.
Nous ne possédons que ce que nous offre la vue
Ce que nous offre la résonance de nos cœurs
Face à la beauté.
Rien de plus.
C’est une force.
Elle n’a rien de matériel
Elle est plus forte que cela
C’est la force de se sentir vivant
Dans un monde où règne la beauté
Où règne la perfection
Où l’on se doit d’être humble
Pour vivre en son sein.
Marcher nus pieds sur la terre mère
Afin de ne pas la blesser
Regarder l’oiseau
Sentir le pouls du sol
En vibrant de toute son âme
En reproduisant ensuite
Avec sa créativité.
J’ai dans le viseur deux yeux
D’or
Qui me parlent en vers et qui récitent
Le poème de la vie.
J’ai dans le cœur un gargouillis chthonien
Qui dessine des fleurs d’excroissances
Multicolores et délirantes.
Je vois ceci et ici
Le retranscrit.
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Carole Radureau (14/01/2023)