Journée de canicule
Publié le 20 Juillet 2022
Dans le noir, on ne peut rien faire
Il fait si sombre derrière le rideau occultant !
Il ne faut pas trop bouger
Se reposer est nécessaire :
Qu’y a-t-il d’autre à faire ?
Ni écrans, source de chaleur
Ni dialogue y compris au téléphone, non
Il faut ménager l’air
Il est trop rare
Le ménager pour la nuit qui s’en vient
Non promesse de vertus :
La nuit est trop courte les journées trop longues.
Le moment présent est le bienvenu : invitons-le !
Il permet de laisser passer les heures l’air de rien.
C’est une vie au compte-goutte
Une vie qui s’écoule métronome, tic tac/tic tac : un monde pianissimo
Une vie qui s’écoule sablier à compter les grains un par un.
Pourtant c’est un moment où s’invite,
Curieuse,
La poésie.
Elle aime occuper les vides.
C’est vrai, il n’y en a pas souvent et à présent,
La nuit, je dors et la lune
N’est plus beaucoup ma conseillère, ma muse.
C’est un contexte géographique à l’origine de cette nouveauté
Là où je dors la lune n’est plus très visible
Je ne ressens plus son appel
Elle me manque comme manquent aux poètes leurs muses effacées
J’ai oublié les insomnies au fond d’un vase
Avec les bouquets de roses
La canicule me les rend.
La vie au compte-goutte s’apprend
Comme à dessiner des lettres qui, un jour
Feront des poèmes.
On perd des choses que l’on croyait acquises dans cette vie-là
Du moins, nous ne nous étions pas posé la question
On perd des « habitudes »
On troque ça contre ça ou contre rien
Qu’importe !
Il convient de s’adapter.
Ce serait bien que ça ne dure pas tout l’été !
Que de journée perdues ou bien
Que de jours de vie gagnés.
La vie est une rose des sables
Qui tricote sa vertu sur des aiguilles de cactacées
Le vent l’efflore le vent effleure ses pétales de silice
Le vent l’ébrèche et elle,
Elle ne dit rien
Elle sort ses aiguilles d’un numéro plus grand pour tricoter
Une robe de plus forte vertu.
La vie est une toile d’araignée
Faite de faiblesse et de force
Avec en son cœur
Une chambre de volonté.
J’aimerais que les citoyens du monde se donnent la main
Comme dans le poème pour faire une chaîne solidaire
Autour du globe, notre Terre Mère
Pour se révolter contre la destruction
Pour faire la révolution
C’est notre habitat que l’on détruit
C’est notre alimentation notre vêtement notre toit notre eau vitale
Le sol sur lequel nos pas glissent comme des injures
Insèrent chaque jour des empreintes indélébiles.
J’ai bien compris que les « grands » de ce monde ne feraient rien
C’est simple :
Ils s’avouent vaincus avant de commencer
C’est pour eux une cause perdue
Ils ont tant attendu !
Voulant s’en mettre toujours plus plein les poches
Maintenant que la solution c’est juste ralentir la casse
Ils s’en moquent !
On dirait que c’est utile d’être riche à milliards quand on est mort !
On dirait que c’est de la schizophrénie ?
Mais le peuple est toujours celui qui paie le plus cher les notes
Mais les gens simples sont ceux qui n’ont pas les moyens palliatifs
C’est bien beau de dire clim par ci, voiture électrique par là, chauffage électrique par ci, isolation par là
Ces mesures ne concernent pas les plus humbles qui n’ont d’autre choix que rester et subir
Il ne faut pas pousser !
Trop c’est trop et partie en fumée la forêt se meurt
Elle est en sursis et le cactus attend son tour pour occuper les vides
Dans le sable libéré.
Bienvenues petites bêtes asiatiques vous êtes ici chez vous !
Servez-vous sur ces vieux légumes ratatinés par le soleil
Prenez ce que nous n’aurons pas
Nous sucerons un caillou dur, fou et flou comme le temps à venir
Nous tricoterons comme l’araignée une toile en raphia
Dans laquelle aucune victuaille n’aura prise
Attendant en rêve que vienne s’y prendre un bison bien gras
Nous écrirons sur un parchemin de bambou
Des poèmes qui glorifieront la pousse des glaciers
Et l’avènement de l’aurore boréale sur des mètres de neige
Tout en rêvant d’une bonne soupe de renne avec un bâtonnet glacé en prime.
L’eau des rivières s’engobe.
Elle craint le pire
Veut s’économiser
A quoi sert de vouloir sauver ce qui est local si rien n’est fait au niveau global ?
Subir comme une canicule le déclin et survivre peut-être au chaos
De régulation en régulation les comptes seront bons
Beaucoup ne seront plus là pour regarder ce monde humain en déclin
Gens et bêtes, plantes et arbres, organismes vivants non adaptables
Les humbles seront perdus pour l’histoire
Seuls les forts vivront (en encore )
Cela a toujours été ainsi
Il faut l’accepter
Ou bien être du côté des forts
Si ce n’est pas le cas
Se taire
Ou écrire (un poème s’entend) car pour ce qui est de réclamer :
A qui de droit ?
Carole Radureau (18/07/2022)