Elle paraissait, la poésie

Publié le 9 Mai 2022

 

Elle paraissait, la poésie

Etre jeune

Etre neuve    toute neuve

Alors qu’elle sortait d’une cave

Où l’exil l’habillait d’un regard de tendresse ;

Alors qu’elle venait d’une île où

Ne poussaient que des cailloux

Où l’on faisait transporter des cailloux

Casser des cailloux aux poètes

Qui n’avaient pas voulu renier leurs valeurs

Elle avait pu survivre enterrée sous des pierres

Cachée dans de petites caches où elle est probablement   encore ;

Elle paraissait légère la poésie alors

Qu’elle arrivait tout droit du front

On l’avait écrite sur un morceau de journal

Où un jour avait surgi

Comme éclairé par une bombe

Elle avait surgi comme une flamme que l’on protège

Pour pouvoir, oui, pour pouvoir

La partager avec ceux que l’on aime

C’était une poésie qui disait « Je t’aime »

Sans doute pour la dernière fois

C’était une poésie dans laquelle on avait mis

Des vers tirés tout droit des entrailles

Où la fleur était absente et où l’on voulait surtout

Qu’elle soit.

 

Elle paraissait insouciante, la poésie

Pourtant on la hissait dans chaque coin du monde

Comme un étendard des luttes des opprimés

Comme une chanson à moitié

Oui, à moitié car elle disait sans dire

Pour déjouer la censure.

 

Elle était amusante la poésie quand on disait Prévert

Pourtant elle était surtout sérieuse et quand on disait Eluard

Elle était douce-amère :

Elle était voyageuse, la poésie

Quand elle servait de compagne à l’exil ;

L’exil :

La force des mots qui savent pourquoi ils sortent

Pourquoi ils s’expriment

Pourquoi ils existent

Car c’est dans l’exil que l’homme réalise ce qu’il perd

Cela lui paraît tout à coup plus beau

Et la poésie se couche, toute nue

Dans la beauté

Elle n’a pas honte, non, comme elle n’a pas honte, la poésie !

Elle se sent à sa place

Car nue elle est, née comme la nature du monde

Et si l’on vient par exemple

Cacher un petit brin de sa nudité avec une.....voyons voir....

Une fougère

C’est comme lui offrir la plume et l’encre pour qu’elle s’écrie

Encore

Pour qu’elle s’écrive

Encore.

 

Ah ! poésie, ne cesse jamais d’accompagner nos luttes

Ne cesse jamais de te coucher toute nue dans la soupe de nos vers

Tu te retournes et la soupe devient caviar d’aubergine

Tortilla et tamales pour nourrir la faim de poésie des hommes.

 

Carole Radureau (09/05/2022)

avec cette jolie fougère du Vivarais de Serge pour illustrer ce petit blabla : 

Elle paraissait, la poésie

Rédigé par caro et hobo

Publié dans #Poética

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H
Bel hommage à le poésie engagée
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C
Merci Serge.