Perle de glaise
Publié le 3 Septembre 2019

Tu as écris le mot « argile ».
Ay ! Colle aux mains,
… colle au cœur
….colle aux pieds,
…….colle au corps !
En habit d’argile
Nés de cette chaleur
De cette intimité précieuse
Comme une peau sur nous
Adhérant telle la culotte de la terre-mère.
Cette masse cette glaise cette farine à l’eau
Moulée comme extraite d’une cocotte infernale
Elle te prend aux tripes
Te pends aux lèvres
Jamais ne te glisse des mains :
Elle tient bien :
Elle sait ce qu’elle veut.
Et on la veut
On a pour elle tant de projets
Cette chair que l’on pétrit que l’on malaxe
Que l’on cuit enfin
Que l’on vernit
Que l’on peint
Que l’on admire dans la maison
Ou le musée.
Ce sang de glaise dont tu es constitué
Cette masse première
Avec ces imperfections
Ces talons en galoche
Ces fossettes
Ces double-mentons
Ces cellulites
Ces ridules fissurées par le temps, la chaleur :
C’est toi dans la glaise !
Ta matière mère.
Les tous premiers hommes l’avaient compris
Modelant la figure tutélaire dans la terre
Cette enveloppe de terre-mère ne l’as-tu pas en tête
Quand ses cuisses s’apprêtent à fondre
Quand ses fesses sont sur le grill
Quand ses narines se rétrécissent sous les fumées huileuses ?
Tu as écris « argile » et je rêve engluée dans des mots
Des mots que l’argile dicte et qui résonnent
Des mots d’argile, des mots de glaise, des mots confusément.
Je peloterais tes bourrelets disgracieux
Je n’en ferais pas une bête de concours
Je caresserais tes chairs brinquebalantes
Car le temps a caressé ton âme
Je triturerais ta barbichette, ton sixième orteil
Car l’imperfection est dans la nature-même
J’aimerais tout de toi car tu es
Représentation.
Je n’écrirais pas une poésie belle à lire
Car s’attache à moi
Une matière trop aimée
Trop adulée par le temps
Offerte
Par les artistes
Adorée
Par les érudits
Admirée.
J’écrirais cette poésie tellurique
Celle que tu n’oublies pas
Celle que tu as sous les ongles
Celle qui tinte dans ta tête :
Qu’il est bon de se sentir aimé.
Si adhérente est ta bonté.
Ta question même
Ton évidence
Sont en moi comme une seconde peau.
Représentation de la fertilité
Je sens en moi ton germe profond et pur
Qui naît par les mots
Se répand comme l’argile chaude.
Tu as écris le mot « argile »
Ay ! Colle aux mains,
… colle au cœur,
…. colle aux pieds,
…….colle au corps !
Carole Radureau (03/09/2019)
Poème inspiré par le texte d'Alma ci-dessous :
Une chaleur brutale s'était abattue sur nous du jour au lendemain. D'un printemps maussade et frais, on était passés à l'été. Le soleil arrachait de la mer froide comme des fumerolles qui ava...