Lui.

Publié le 26 Octobre 2018

« Et je sens
que « moi »
est trop petit pour moi.
Quelqu’un veut en sortir obstinément. »

Vladimir Maïakovski – La nuage en pantalon


Si je pouvais
Chanter l’algorithme aux boucles de licorne
Avec un mouchoir de liane fleurie
Je tisserais une trame de vie
Dans laquelle attraper la folie.

Mais il est là et de barreaux
Un air lugubre
Et
Sombre
Et restreint
Ceint
Mon front
Mon être
Mes mains.

Si je pouvais
D’une caresse d’ombre
Et d’un souffle de coquelicot
Porter un désir d’oiseau
Juste tenir une petite patte
Et lui dire :
Vole maintenant !
Je broderais une toile aïda
De mille petites croix violettes
Et d’un cœur rouge sang
A offrir
Du plat de la main.

Mais à l’affût
Une chasse croisée
Un labyrinthe au serment dévoyé
Une arithmétique précise
Qui ne dit pas son nom
La confusion
La précision
L’addition
Et c’est un mur de lances acérées
Chaque jour
Additionnées
Chaque jour
Précisément inscrites
Dans un sol
Apprêté.

La vie éteint la vie d’un revers de lèvre
La vie reprend la vie d’un sourire de travers
La vie se trompe de vie en regardant au loin
Mais la vie n’est rien
Seules les conditions de vie comptent réellement.

Si je pouvais
Ne serait-ce qu’une nuit dormir
A poings fermés
Sans conter, compter
Creuser la faim d’un édredon ultime
Je rêverais de ce que la nuit offre :
Un hippocampe joyeux et sa roue de fortune
Un canari jaune d’or et son chant de vermeil
Une houle sévère et furieuse avec fracas et gouttes
Sans foi ni loi ni peur ni rien
Un air pur et frais pioché dans l’altitude austère
D’une montagne encore inconnue
Avec un peu de chance une marmotte rigolote
Et un chamois de guingois rigolant aux éclats.

Mais il ne faut pas oublier
L’élastique.

Le fil de fer, fil à la patte, le cordon
La cheville prisonnière du fer
La main attentive à tout
La gorge qui se cache et se terre
Le nez qui pense devenir fou
Mais il ne faut pas l’oublier
Lui
Car lui n’oublie pas.

Un jour peut-être
Il partira
Il s’évanouira
Je soufflerais sur le semblant d’une pensée échappée
Une bulle éclatera
Et avec elle,
Lui, il
Eclatera.
Dissout.
Evaporé.
Histoire passée.
Page à tourner.
Et si des forces me restent
Je vivrais par mes pores rétractés
Ma peau désireuse
Mon cœur enfermé
Mon âme aux ailes coupées
Je vivrais
Même une journée ne serait-ce qu’une journée
Une vie
Comme les autres.
Sans lui.
L’allergène.

Carole Radureau (26/10/2018)

Rédigé par caro et hobo

Publié dans #Larme d'apache

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H
j'aime quand tu écris à l'encre de tes tripes ...
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C
J'ai du mal ces derniers temps, parce que je ne sens plus trop mes tripes (elles ont fondu !!)<br /> Et puis je n'ai pas vraiment envie d'en parler.......mais je sens que je retrouve quelques sensations en ce moment.<br /> Bisouxx mi Serge-Hobo
A
Oh je ne m'attendais pas à la chute! C'est un très beau poème avec de très belles métaphore et pourtant c'est un poème de souffrance. Je compatis Caro. J'espère qu'un jour tu auras sa peau à ce s-----d qui te bouffe toute ton énergie.
Répondre
A
Parce que je trouve que c'est une des bases fortes de la poésie et toi particulièrement tu as des trouvailles géniales.
C
Merci Alma, tu vois parfois il faut retirer de soit une épine et la coucher sur le papier. Mais je ne me bats pas contre ça, j'ai compris que la résistance dans cette situation ou dans la maladie, ça donne plus de souffrance encore. Non, il faut l'accepter car seule l'acceptation permet de la dépasser. Et à côté de ça on s'adapte, on fait de notre mieux pour s'assurer un quotidien digne, avoir le moral, faire ses activités quotidiennes, en étant toujours à l'affût de tout ce qui pourrait être un problème. Et de soigner ce qui peut l'être, écouter les messages de son corps.....je n'ai pas encore fait un tour de cadran, je découvre chaque jour ce qui me tombe dessus, ce qui m'enferme encore plus et chaque fois il faut ruser et redoubler d'astuce pour s'adapter. Je pense que dans un environnement chaud (25/30°), constant, comme nous avons eu cet été, avec la possibilité de sortir dehors, même si ce n'est que dans le jardin, j'aurais pu avoir quelques améliorations. Là, je vais perdre de longs mois, mais le chemin doit être fait qui mène à la guérison. Je suis sur ce chemin, il faut que je chemine du mieux possible pour rester forte. Voilà. Dis-donc, Alma, tu ne m'as jamais dit pourquoi tu aimes tant les métaphores ?